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Policier

  • La loi des collines

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    "Le maire s'en alla et Mick fut soulagé d'avoir un moment pour lui. Il s'était trouvé une bonne dizaine de fois dans cette position - attendre des informations médicales sur un blessé - mais jamais pour un membre de sa famille. La peur soudaine de perdre Linda le glaça jusqu'à la moelle. Il repoussa cette sensation et la rangea dans une boîte. C'était hors de son contrôle. Il traiterait le cas de sa soeur comme n'importe quel autre".

    Elle est rude la loi des collines, elle charrie de vieilles rancoeurs et pratique facilement la vengeance. Et rien ne s'oublie.

    Voici le troisième et dernier volet des enquêtes de Mick Hardin dans ce coin du Kentucky où il a grandi et qu'il a quitté pour devenir soldat dans des pays en guerre, Afghanistan, Irak, Syrie etc ...

    A 39 ans il peut prendre sa retraite et c'est ce qu'il fait, avec le projet d'aller vivre au fin fond de la Corse et y mener une vie un peu semblable à celle des collines. Il est revenu au pays dire au revoir à sa soeur Linda, shérif de Rocksalt, avant de s'envoler pour la France.

    Linda enquête justement, avec son adjoint Johnny Boy sur la mort d'un mécanicien hors-pair. Mick n'est pas là pour s'en mêler, mais suite à un service rendu dans un conflit anodin, le voilà embarqué malgré lui dans une histoire de combats de coqs clandestins qui vont l'emmener bien plus loin qu'il ne le souhaitait.

    On tire sur Linda qui se retrouve grièvement blessée, deux nouveaux cadavres sont trouvés au grand désarroi de Johnny Boy, peu taillé pour remplacer la shérif.

    Nous retrouvons les personnages des précédents épisodes, des hommes taiseux, souvent brutaux, armés toujours. Mick ne respectera à peu près aucune règle dans cette histoire, s'appuyant surtout sur son instinct et son solide entraînement de soldat.

    Il montre aussi une grande générosité envers plus faible que lui et se sort de situations dangereuses avec une maestria quasi-magique. J'ai trouvé ce dernier épisode un peu trop boursouflé côté intrigue, je me suis perdue parfois dans les personnages et des situations alambiquées, surtout lorsque Mick s'éloigne des collines.

    Il ne faut pas se monter trop exigeant sur la crédibilité de l'ensemble mais j'ai eu plaisir à retrouver Mick une dernière fois et suis toujours aussi étonnée de sa grande politesse devant les femmes, même si elles pointent un fusil sur lui. Il a des manières ce gars-là.

    "Quand t'auras trouvé le minable qui lui a tiré dessus, l'embarque pas. Tu l'étales et tu rappliques chez nous, t'entends ?
    Oui Madame."

    Les deux précédents : Les gens des collines  - Les fils de Shifty

    Chris Offutt - La loi des collines - 288 pages
    Traduit de l'américain par Anatole Pons-Reumaux
    Editions Gallmeister - 2025

  • Nos fantastiques années fric

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    "Taisez-vous, Fernandez. Tout le monde sait que c'est la guerre entre les services de police et la cellule de l'Elysée. Et la cellule c'est Grossouvre, Ménage et moi. Donc, si les RG sont au courant de cette affaire par Chardon, ils n'hésiteront pas à s'en servir pour m'abattre. Et, au passage, plomber les socialistes aux élections de mars prochain".

    Je souhaitais découvrir Dominique Manotti depuis longtemps, voilà qui est fait, avec une lecture plutôt addictive.

    L'intrigue se déroule à la fin du premier septennat de François Mitterrand. Victor Bornand est un très proche du Président, au fait de toutes les opérations au coeur de la cellule de l'Elysée, au fonctionnement plutôt opaque. C'est aussi un homme à femmes, amateur entre autres des pensionnaires d'une certaine Mado, à l'adresse bien connue du gratin parisien.

    Bornand est sur une affaire de trafic d'armes avec l'Iran, alors sous embargo. Trafic d'armes souvent couplé à celui de la drogue. Une affaire juteuse sur le point de se conclure à la grande satisfaction des parties concernées.

    Le meurtre d'une call-girl de Mado va être le grain de sable qui va gripper la machine.

    L'enquête est menée par une jeune policière, beurette selon le terme de l'époque, Noria Gozhali et un commissaire débutant, Bonfils.

    C'est une histoire complexe, truffée de magouilles, de coup bas dans le monde politico-médiatique et mafieux. Les règlements de compte sont sanglants. En filigrane, se joue le sort d'otages retenus au Liban.

    L'autrice est historienne de formation, sans doute bien documentée et c'est difficile de croire que ce genre d'histoire appartient au passé. Ça fait froid dans le dos.

    J'ai parfois eu du mal à m'y retrouver dans cette sombre galaxie tendue uniquement vers l'argent, le pouvoir et le sexe. Dès le départ nous savons que Bornand est un sale type, mais c'est encore pire que ce que je pensais. Quand on a connu cette période, c'est assez facile de mettre des noms sur quelques personnages ou un certain journal qui paraît le mercredi par exemple.

    En face, Noria et Bonfils ne lâcheront pas leur enquête, Noria a de bonnes raisons de s'obstiner, malgré la hiérarchie et les menaces.

    J'ai aimé ce roman, écrit sans fioritures, il va droit au but. Evidemment ce n'est pas brillant sur l'état de corruption de notre société et je ne pense pas que nous ayons fait beaucoup de progrès depuis. Que savons-nous vraiment de ce qui se passe dans notre pays ?

    Un film a été tiré du roman "Une affaire d'Etat". Je ne l'ai pas vu.

    Dominique Manotti - Nos fantastiques années fric - 256 pages
    Rivages poche - 2021

  • Les fils de Shifty

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    "Mick hocha la tête. Il avait tendance à se souvenir des choses qui le rendaient triste - le deuil et le chagrin, les fautes et les faux pas. Il se demanda si c’était juste qu’il n’avait pas de bons souvenirs, ou s’il était incapable de se les remémorer."

    J'avais apprécié "Les gens des collines" et sachant que c'était une trilogie j'avais hâte de découvrir le deuxième épisode.

    Même décor, une petite ville du Kentucky où Mick a passé son enfance. Il est en convalescence de l'armée, où il est enquêteur. Il a connu plusieurs terrains de guerre, la Syrie, l'Irak, l'Afghanistan où il a sauté sur une bombe artisanale, d'où sa blessure et son retour momentané au pays.

    Il savait en rentrant que sa femme, Peggy, voulait divorcer, lasse de ses perpétuels départs. Il s'y est résigné et ne lutte plus pour la faire changer d'avis. Pour l'heure il vit chez sa soeur, Linda, shérif de la petite ville, en campagne de réélection.

    Il commence à envisager son retour à l'Armée, en Allemagne lorsque l'on découvre un cadavre abandonné sur un parking. C'est un des fils de Shifty Kissick, connu pour être un trafiquant de drogue.

    Shifty est parfaitement au courant du trafic de son fils et en connaît les rouages. Elle soupçonne quelque chose de pas net derrière sa mort et demande à Mick d'enquêter officieusement. C'est un enfant du pays, il connaît les gens, la mentalité du coin, il aura les coudées plus franches pour chercher.

    Mick accepte, sachant que l'enquête officielle est menée par le shérif, c'est-à-dire sa soeur, Linda. Par ailleurs, il devra se débarrasser de son addiction aux anti-douleurs qu'il avale un peu trop comme des bonbons.

    Une fois mis le doigt dans l'engrenage, il est entraîné dans une histoire de trafic, de vengeance, de règlements de comptes où il ira plus loin peut-être qu'il n'aurait voulu.

    Ce deuxième volet est aussi réussi que la premier. Mick est plutôt du genre taiseux, mais les questionnements ne manquent pas dans sa tête, au grand plaisir de la lectrice. Au fur et à mesure de ses recherches, la violence monte, un deuxième fils de Shifty est tué, Mick est pris à parti lui-même.

    Ce qui est étonnant, c'est la place de la nature dans cet univers noir, Micky y est attentif, la décrit merveilleusement bien, tout comme "Oncle Merle" qui écoute et parle aux oiseaux. Certains des personnages secondaires sont d'ailleurs assez pittoresques, allégeant l'ambiance mortifère.

    Il me reste à attendre le troisième volet "La loi des collines" annoncé pour le 5 Février.

    Chris Offutt - Les fils de Shifty - 288 pages
    Traduit par Anatole Pons-Reumaux
    Gallmeister - 2024

  • Un café maison

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    "Il avait choisi des femmes solitaires parce qu'il voyait les femmes comme des machines à faire des enfants. Peut-être lui semblait-il plus simple qu'elles ne soient pas pourvues d'accessoires potentiellement embarrassants, comme des amis."

    Encore un auteur que je voulais découvrir depuis un bon moment, avec son enquêteur récurrent, l'inspecteur Kusanagi. C'est fait avec ce café maison qui va entraîner tant d'expériences diverses autour de la préparation du breuvage.

    Ayané Mashiba et Yoshitaka Mashiba sont mariés depuis un an. Ils ont conclu un accord tacite. Si Ayané n'attend pas un enfant d'ici la fin de l'année ils divorceront. Yoshitaka conçoit le couple uniquement comme construction d'une famille, s'il n'y a pas d'enfant, il n'y a pas de raison de continuer ensemble.

    Au terme de l'année, Ayané n'est donc pas surprise de l'annonce de Yoshitaka l'informant qu'il va la quitter pour une autre femme. Elle ne se rebelle pas et décide d'aller passer le week-end chez ses parents, seule, pour réfléchir.

    Le dimanche, Yoshitaka est retrouvé, mort, à son domicile par Hiromi Wakayama, l'assistante d'Ayané. Les deux femmes réalisent des patchworks avec un certain succès.

    L'inspecteur Kusanagi est chargé de l'enquête, avec sa jeune collègue, Kaoru. La police scientifique établit assez vite que la tasse de café de Yoshitaka contenait de l'arsenic. Toute la question va être de trouver comment l'assassin a procédé pour introduire le poison sans se faire remarquer.

    Nous apprenons rapidement que l'assistante d'Ayané, Hiromi Wakayama est la prochaine femme choisie par la victime et qu'elle est enceinte. Qui avait donc le plus intérêt à tuer Yoshitaka ?

    Kusanagi tombe assez vite sous le charme d'Ayané, ce qui l'empêche d'avoir les idées claires et impartiales d'après Kaoru, sa collège, nettement plus méfiante envers l'épouse bafouée. Kaoru va demander l'aide du Professeur Yukawa, brillant scientifique, pour trouver comment l'arsenic est arrivé dans le café.

    J'ai d'abord eu un peu de mal à me familiariser avec les noms japonais et à les mémoriser. J'ai trouvé que la police japonaise était vraiment très polie avec les suspects, voire prévenante. La lectrice a une longueur d'avance puisque dès le départ nous savons qui a tué, tout le suspense est dans la méthode utilisée.

    Quand je dis suspense, il n'est pas haletant. Tout cela est long et lent et j'ai terminé avec un soupir de soulagement. Peut-être ne suis-pas tombée sur le meilleur de la série. Pas sûr que je continue avec l'auteur.

    L'avis de Fanja Dasola Kathel Sandrion

    Keigo Higashino - Un café maison - 336 pages
    Traduit du japonais par Sophie Rèfle
    Babel noir - 2013

  • Une disparition inquiétante

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    "Ce n'est pas ça. Ce qui est dur, c'est de ne pas savoir si on s’occupe d'un délit ou pas. Parce que nous avons appris à enquêter sur des actes criminels, à manipuler les truands ou faire pression sur eux. Alors que dans un dossier de disparition tu ne sais pas, la plupart du temps, s'il y a eu crime ou non. Tu te retrouves à soupçonner tout le monde, les voisins, les amis, les proches, le disparu lui-même, tous ces gens s’inquiètent comme toi pour leur proche - pardon, ils s'inquiètent plus que toi, - mais tu es obligé de les soupçonner, tu n'as pas le choix, tu dois agir comme si tous te cachaient quelque chose. Et dans la majorité des cas, tu finis par découvrir qu'aucun crime n'a été commis et que personne ne t'a rien caché."

    J'ai fait la connaissance du Commandant Avraham Avraham avec sa quatrième enquête (ici). Cette fois-ci je prends la série au début et c'est amusant de le voir faire seulement la connaissance de Marianka, alors qu'il était jeune marié dans ma précédente lecture.

    Nous sommes dans la banlieue de Tel-Aviv et en fin de journée, Avraham reçoit une femme qui vient signaler la disparition de son fils adolescent, Ofer. Fatigué, peu enclin à creuser davantage, Avraham lui demande d'attendre le lendemain matin, s'appuyant sur le fait que souvent il s'agit d'une fugue passagère.

    Mais le lendemain Ofer n'est toujours pas rentré et Avraham lance les opérations de recherche. C'est un premier loupé et il y en aura d'autres au cours de l'enquête.

    Avraham n'est pas spécialement sympathique, il n'a pas un caractère facile, n'a pas confiance en lui, il fait grand cas des avis de sa supérieure hiérarchique, mais n'apprécie pas qu'elle lui adjoigne un jeune collège dont les dents rayent le parquet. La rivalité entre les deux hommes n'arrangera pas la progression de l'enquête.

    Avraham, aveuglé par ses certitudes passe complètement à côté des bizarreries d'un voisin qui cherche à s'immiscer dans l'enquête, on se demande dans quel but.

    Parallèlement, Avraham est obligé d'aller faire un stage en Belgique, histoire de comparer les méthodes des uns et des autres. Cette incursion chez nos voisins a quelque chose d'un peu folklorique. Il pleut tout le temps, on mange des moules et des frites ... et il pense sans arrêt à son enquête en cours en Israël.

    La bonne nouvelle, c'est qu'il va rencontrer Marianka et que leur relation va prendre de la consistance durant son séjour.

    J'ai trouvé le début un peu laborieux, puis au fil de ma lecture j'étais de plus en plus accrochée par les multiples rebondissements de l'enquête. Les personnages sont complexes et les implications psychologiques bien décrites. Malgré ses erreurs et ses imperfections, Avraham devient attachant. Son obstination va lui valoir une mise à l'écart et pourtant il ira au bout.

    Rien d'exceptionnel dans ce polar, mais une lecture finalement plaisante et qui réserve une dernière surprise à la fin.

    L'avis de Alex Brize Kathel

    Dror Mishani - Une disparition inquiétante - 384 pages
    Traduit de l'hébreu par Laurence Sendrowicz
    Points - 2015

  • Quand un fils nous est donné

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    "Ils prirent sur la gauche et descendirent vers les Gesuati, le soleil dans le dos. Ils furent surpris par le nombre de gelateri qui avaient ouvert au cours de l'année précédente. Brunetti se demanda si les glaces et les pizzas étaient devenues les deux produits gastronomiques les plus répandus en Italie. Dans le monde entier, peut-être ? Un énorme yacht bleu marine, amarré devant une pizzeria, bloquait irrémédiablement la vue sur la rive opposée à la plupart des habitants des immeubles situés sur cette portion de quai."

    Une enquête menée par le Commissaire Brunetti c'est l'assurance d'un bon moment de lecture, à travers les ruelles de Venise, la météo changeante, les frasques bien cachées de la bonne société etc .. etc .. on en oublierait presque qu'il y a forcément un ou plusieurs meurtres.

    Cette fois-ci l'enquête est d'autant plus délicate que la victime est un grand ami du beau-père de Brunetti et de Brunetti lui-même. Gonzalo Rodriguez de Tejeda est sur le point d'adopter son jeune amant afin de le faire bénéficier de sa grande fortune le moment venu.

    Brunetti navigue entre la volonté de son beau-père d'éviter ce qu'il estime indigne de son ami, et le désir de ne pas s'en mêler de trop près. De nombreux pièges le guettent.

    L'enquête est gentiment menée à son terme, mais ce que j'aime surtout c'est la description d'un habitant de Venise, l'envers du décor du tourisme effréné. J'aime retrouver Paola, sa femme, et ses petits plats, ses enfants devenus presque adultes, les tensions à table à cause de sa fille devenue farouchement végétarienne et défenseuse du monde animal ..

    Brunetti, issu d'un milieu populaire et Paola, fille d'une des plus grandes familles de Venise, riche et influente, c'est forcément le choc des cultures, vécu plutôt harmonieusement ici.

    Je classerais cette enquête dans les bons crus et je continuerai à piocher dans la série au gré de mes envies. Pour une fois, je ne respecte pas l'ordre chronologique.

    Donna Leon - Quand un fils nous est donné - 336 pages
    Traduit de l'anglais par Gabriella Zimmermann
    Points - 2021

  • Territoires

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    "Vous ne savez pas comment gérer ces milliers de gamins sans diplômes ni emplois, mais moi je m’en occupe. Je leur donne un travail et ils font vivre leurs familles. Résultat, le trafic tempère vos quartiers défavorisés et hypocritement, vous nous avez laissés faire, comme si vous ne connaissiez pas les raisons de ce calme."

    Après Code 93, je n'ai pas tardé à retrouver Victor Coste et son équipe, toujours à Malceny. L'entrée en matière est rude avec trois exécutions particulièrement brutales, laissant supposer qu'il y a un changement de tête dans le contrôle du trafic de drogue.

    Au cours de l'enquête, nous croiserons un jeune ado de 13 ans qui n'a peur de rien et n'a pas de limites dans la violence ; deux vieillards mêlés malgré eux au trafic, une Maire qui navigue à vue pour préserver la paix sociale et surtout sa réélection.

    Le quotidien décrit dans ce deuxième roman est impressionnant par la dégradation, oserai-je dire de la qualité de vie dans certains lieux ; dire qu'ils sont abandonnés par les pouvoirs publics est peu dire. Comme l'auteur était policier dans le 93, j'imagine que ce qu'il décrit est très près de la réalité, même s'il a exagéré certains aspects.

    La compromission de la Maire, son peu de scrupules pour obtenir le calme, ses manoeuvres pour avoir le vote d'une communauté, font froid dans le dos. Des vies humaines en dépendent.

    L'auteur sait maintenir un suspense et ménager les rebondissements. L'équipe de Coste est rodée et le suit, même lorsqu'elle ne comprend pas forcément sa logique.

    Roman dévoré, malgré la dureté de ce qu'il raconte. L'humanité et les failles du Capitaine Coste tempèrent l'horreur ambiante.

    Un auteur à suivre. J'ai maintenant "Entre deux mondes" sous le coude.

    L'avis de Alex Dasola Luocine

    Olivier Norek - Territoires - 384 pages
    Pocket - 2015

  • Code 93

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    "Quatre voies grises et sans fin s’enfonçant comme une lance dans le cœur de la banlieue. Au fur et à mesure, voir les maisons devenir immeubles et les immeubles devenir tours. Détourner les yeux devant les camps de Roms. Caravanes à perte de vue, collées les unes aux autres à proximité des lignes du RER. Linge mis à sécher sur les grillages qui contiennent cette partie de la population qu’on ne sait aimer ni détester. Fermer sa vitre en passant devant la déchetterie inter-municipale et ses effluves, à seulement quelques encablures des premières habitations. C’est de cette manière que l’on respecte le 93 et ses citoyens : au point de leur foutre sous le nez des montagnes de poubelles. Une idée que l’on devrait proposer à la capitale, en intramuros. Juste pour voir la réaction des Parisiens. À moins que les pauvres et les immigrés n’aient un sens de l’odorat moins développé"

    Je voulais découvrir cet auteur de polars depuis longtemps, voilà qui est fait. Nous sommes dans le 93, département particulièrement pauvre en région parisienne. Appelée sur les lieux d'un crime, l'équipe de Victor Coste de la PJ découvre un homme émasculé. Déclaré mort, il se réveille au milieu de l'autopsie.

    Comme si cela ne suffisait pas, un deuxième cadavre couvert de brûlures est trouvé à son tour dans un appartement vide. C'est celui d'un jeune toxico. Coste est un flic aguerri, ces deux affaires sentent les ennuis à plein nez, juste au moment où il perd son meilleur adjoint, muté à Annecy.

    Je ne dirai pas grand chose de l'enquête, au risque de trop en dévoiler. Elle part du corps d'une jeune femme non identifiée, toxico très abîmée et de la mystérieuse disparition de dossiers.

    L'affaire se complique au fur et à mesure, sans que l'on perde le fil. L'auteur étant lui même un policier, on imagine que ce qu'il décrit est très près de la réalité. Le style est cru, les touches d'humour aussi.

    Malgré sa longue expérience, Victor se retrouve dans un certain brouillard, pris dans une embrouille qui touche sa hiérarchie, mais pas que .. Une partie de l'action touche au trafic de drogue, à la prostitution, mais aussi aux manoeuvres politiciennes autour du projet du Grand Paris.

    Coste est un flic assez attachant, il n'a pas perdu une certaine humanité. Il ne se remet pas du suicide de sa compagne, mais n'est pas indifférent au charme de la médecin légiste.

    Il frôle la catastrophe plusieurs fois dans cette enquête, qui se refermera d'une drôle de manière.

    J'ai suffisamment aimé pour me procurer dès maintenant le deuxième roman de la série. Je ne vais pas tarder à retrouver Coste et son équipe assez haute en couleurs.

    L'avis de Sandrion Alex Miriam

    Olivier Norek - Code 93 - 258 pages
    Pocket - 2014

  • Maisons de verre

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    "Le directeur général Gamache passait ses journées dans la fange, la profanation, la tragédie, la terreur. Puis il rentrait chez lui, à Three Pines. Son sanctuaire. Où il s'asseyait au bistro avec ses amis, ou dans l'intimité de son salon avec Reine-Marie. Henri et la drôle de petite Gracie à leurs pieds. Sains et saufs. Jusqu'à ce que la chose sombre se manifeste. Et refuse de disparaître."

    Treizième enquête d'Armand Gamache, devenu Directeur de la Sûreté à Montréal. Il a fort à faire pour reprendre en main un service corrompu depuis de nombreuses années. Il doit remonter des équipes fiables et solides, d'autant plus que le trafic de drogue s'est intensifié au Québec et nécessite des mesures d'ampleur.

    C'est dans ce contexte difficile que surgit soudain une silhouette noire et masquée au centre du village de Three Pines. Immobile, silencieux, le sinistre personnage ne bouge pas, mettant progressivement les habitants mal à l'aise, Gamache y compris. Il essaie de le faire partir, sans succès, aucune loi n'est enfreinte. Il disparaît la nuit, pour revenir au petit matin.

    Quelques jours passent ainsi, puis un cadavre est découvert dans la cave de l'église du village.

    Je n'en dirai pas plus, sauf que la crise des opioïdes à laquelle Gamache doit faire face et le cadavre du village ont un lien qui finira par être dévoilé.

    Je n'ai pas été très convaincue par l'intrigue, souvent tirée par les cheveux. D'un côté, une légende ressortie d'une époque lointaine, de l'autre Gamache prenant des risques invraisemblables pour contrer les trafiquants de drogue, c'est peu crédible.

    Au bout d'un moment, je me suis laissée quand même embarquer. Ce qui me plaît dans cette série, c'est la vie au village, l'évolution de l'équipe de Gamache, à commencer par Beauvoir, devenu son beau-fils, les habitants de Three-Pines, l'auberge d'Olivier et Gabri etc ...

    Bref, lu sans déplaisir, mais sans doute vite oublié.

    L'avis de Doudoumatous et Eimelle

    Louise Penny - Maisons de verre - 448 pages
    Traduit de l'anglais par Lori Saint-Martin et Paul Gagné
    Actes Sud - 2023

  • Un simple enquêteur

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    "Avraham, qui n'était donc plus chargé de l'affaire, ravala ses doutes. De toute façon, mieux valait attendre, vu qu'il n'avait aucune preuve. Il était le seul dans cette pièce à avoir observé de près le visage gris de la victime. Le seul à avoir identifié la terreur qui était restée gravée sur ses traits, tandis que tous les autres, persuadés qu'ils avaient décrypté cet homme et ce qui lui était arrivé, n'aspiraient qu'à se débarrasser du cadavre pour l'enterrer en même temps que le dossier et passer au suivant".

    Je voulais faire la connaissance du commissaire Avraham Avraham depuis un moment ; c'est chose faite avec cette quatrième enquête et je précise que je n'ai pas été gênée de ne pas avoir lu les précédentes.

    Avraham a 44 ans, il travaille dans la banlieue de Tel-Aviv et vient de se marier avec Marianka. Il est las des enquêtes banales qui lui sont confiées et rêve d'un poste plus ambitieux, au niveau international peut-être. La suite lui démontrera qu'il se fait sans doute quelques illusions. Ajoutons que c'est un grand lecteur de romans policiers et qu'il aime Henning Mankell et Simenon, entre autres.

    Dans ce roman, deux affaires lui sont confiées et les chapitres alternent entre l'une et l'autre.

    Un bébé prématuré est abandonné aux portes de l'hôpital. La femme qui l'a laissé là est assez rapidement identifiée et affirme être la mère, ce qui est faux. Elle s'entête malgré tout à maintenir sa déclaration avec une insolence et un aplomb stupéfiants.

    Par ailleurs, la disparition d'un touriste suisse est signalée par un hôtelier. Il sera retrouvé mort noyé sur une plage. Mais il était aussi en possession d'un passeport israëlien et utilisait deux identités différentes. L'explication avancée par sa hiérarchie, un trafic de drogue qui a mal tourné, ne convainc pas Avraham, d'autant plus que la fille de la victime affirme que son père était un agent du Mossad.

    Avraham laisse l'enquête du bébé à son adjointe et va s'obstiner à chercher la vérité pour le touriste suisse (en réalité un Français) malgré l'ordre formel de clore le dossier.

    Les deux enquêtes ne cesseront de se croiser, emmenant Avraham jusqu'à Paris.

    La plus intrigante est celle qui implique le Mossad. Avraham avance à tâtons, des bâtons lui sont mis dans les roues, il saisit qu'il est manipulé, il rencontre des gens qui n'ont pas d'existence officielle, il doute constamment des pistes qu'il trouve, il reçoit des mises en garde.

    L'affaire du bébé n'en est pas moins intéressante elle aussi. Le comportement de Liora, se prétendant la mère, est particulièrement tordu ; elle déstabilise l'enquêtrice l'agressant sans arrêt, y compris sur son aspect physique.

    Je n'en dirai pas plus sur les affaires où l'on découvre de multiples implications et chausses-trappes. De plus, Avraham s'occupe officiellement de l'abandon du bébé, alors qu'en réalité il suit surtout les traces du touriste noyé.

    Le commissaire Avraham est attachant. On sent que sa vie a changé depuis son mariage, la présence de Marianka lui est précieuse, ses avis aussi.

    Le rythme est plutôt lent, l'ambiance est privilégiée à l'action, ce qui n'est pas pour me déplaire. Les personnages sont assez fouillés et le suspense est maintenu jusqu'au bout.

    Pour résumer, j'ai aimé cette première lecture de l'auteur, tout était réuni pour qu'elle me plaise.

    Je remercie Masse Critique et les Editions Gallimard

    Dror Mishani - Un simple enquêteur - 352 pages
    Traduit de l'hébreu par Laurence Sendrowicz
    Gallimard - 2023