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Le goût des livres

  • Pause

    Je pars une quinzaine de jours avec l'intention de visiter un maximum de châteaux et les jardins aussi bien sûr. Retour début juillet ; en attendant, portez-vous bien.

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  • Orange amère

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    "Autrefois Teresa avait vu en son mari l'homme le plus séduisant du monde, alors qu'en réalité il ressemblait à une de ces gargouilles perchées sur une corniche au sommet de Notre-Dame, destinées à effrayer le diable et à le chasser. Elle garda cette pensée pour elle, mais il était clair qu'elle était inscrite sur son visage, car Bert changea de ton."

    Voilà un bon roman américain comme je les aime, une histoire familiale un peu compliquée, mais si bien racontée, avec des personnages finement décrits au fil des années.

    Le premier chapitre consacré au baptême d'une petite Franny ne présage pas de la suite du roman. Nous y voyons Bert Cousins qui s'incruste à ce baptême sans y avoir été invité, juste pour fuir son foyer où il laisse sa femme, Teresa, se débrouiller avec leurs trois enfants, plus un quatrième en route.

    Nous sommes dans un milieu de flics et de juristes, tout le monde se connaît plus ou moins, Bert est accueilli en voisin par Fix, le maître de maison et sa femme, Beverly, une beauté resplendissante.

    Chapitre suivant, nous retrouvons Franny, largement adulte, au chevet de son père, Fix, l'accompagnant dans une séance de chimio. Que s'est-il passé entre-temps ? Nous allons l'apprendre petit à petit et dans un désordre chronologique, chaque chapitre nous ramenant à un autre personnage ou une autre époque.

    Je vous rassure, on s'y retrouve très bien. J'ai juste fait un pense-bête au départ pour ne pas me perdre dans les personnages.

    Après le baptême, les couples se sont recomposés, Bert a quitté Teresa pour Beverly, laissant Fix avec ses deux filles. Les uns sont en Virginie, les autres en Californie, les six enfants ne se retrouvent ensemble qu'aux vacances scolaires.

    On retrouve ici toutes les difficultés liées aux familles recomposées, les blessures accumulées, les accommodements, les conflits de loyauté. On devine assez vite qu'un drame est survenu, qui a bouleversé durablement la vie de chacun. Et encore plus lorsqu'un livre paraîtra sur l'histoire de la famille, remuant douloureusement le passé.

    Le rythme est lent, ce qui n'est pas un défaut, il permet de s'attacher longuement à chaque narrateur, d'en retrouver certains longtemps après, transformés par les années, quelquefois apaisés.

    C'est une histoire qui se savoure patiemment et qui m'a manqué lorsque la dernière page a été tournée.

    "Elle était tellement épuisée qu'elle se disait qu'elle avait de la chance de réussir à aller jusqu'à la salle de bains et à la cuisine pour aller prendre un verre d'eau, avant de rejoindre son lit. Elle avait quatre-vingt-deux ans. Elle imaginait que ses enfants risqueraient d'utiliser cette douleur précise à l'estomac pour décider qu'elle ne pourrait plus vivre seule chez elle et qu'elle devrait déménager dans un établissement médicalisé quelque part là-haut, au nord, près de chez Albie. Elle ne pouvait pas s'installer chez Jeannette, les gens s'installent à Brooklyn pour tomber amoureux, écrire des romans, avoir des enfants, pas pour vieillir, et elle ne pouvait pas s'installer chez Holly, même si mourir au centre zen pourrait apporter des avantages spirituels."

    L'avis de Antigone Ingannmic Kathel Keisha

    De la même autrice "Dans la course"

    Ann Patchett - Orange amère - 416 pages
    Traduit par Hélène Frappat
    Babel - 2021

     

     

  • Bon dimanche

    Une belle découverte faite grâce à Colo. Merci !

    November Ultra

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  • Highlands

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    "Sans aucun contrôle sur mon esprit, je ne peux que ressasser cette dernière séquence passée dans notre salon avec toi, mon impitoyable chérie, une matinée entière à nous déchirer à grands coups de griffes et de vérités douloureuses. Trois heures terribles où chaque mot qui sortait de nos bouches en appelait un autre pire encore, dans une sorte de courbe exponentielle, typique de ces embuscades de couple."

    Les blogueuses les plus anciennes se souviennent certainement du " Saut oblique de la truite". C'était il y a dix ans et c'est le temps qu'il a fallu pour que l'auteur nous offre un nouveau roman, cette fois-ci illustré de ses tableaux puisqu'il est également peintre, sous le nom de Rorcha.

    Changement de destination, c'est dans les Highlands que se passe le périple. Le narrateur est dans une passe difficile, après une énième dispute avec sa compagne.

    Il ne voit pas d'autre issue que de quitter l'appartement, en laissant un mot plutôt bref "Je reviens dans une semaine".

    Ce sera l'occasion de ressortir son vieux sac à dos, et de revivre enfin un voyage qu'il faisait l'été avec ses parents et dont il garde de merveilleux souvenirs. Ah les couleurs de ce loch découvert avec sa mère, resté gravé dans son esprit, son père qui l'initiait à la pêche, ce serait si bien s'il transmettait la même chose à son petit garçon.

    Le voilà parti, avec un bagage minimum, retrouvant les sensations du voyage en train, en bus, puis la marche, à l'affût de ses jeunes années.

    C'est un livre dominé par les couleurs, celles des tableaux de l'auteur, intercalées avec le texte et ses somptueuses descriptions des landes écossaises.

    Le ton peut se faire léger, ou nostalgique selon les moments, sans dissimuler l'inquiétude de fond liée à l'incertitude de l'avenir du narrateur. Inquiétude qui lui fera commettre une erreur de débutant et nous vaudra quelques chapitres angoissants, tout seul dans le brouillard, livré à des questions existentielles. 

    "Mon cerveau s'engourdit. La terreur et le froid me pénètrent simultanément, les choses vont vite et pas dans le bon sens. Je n'arrive plus qu'à fixer mon attention sur cette pluie sans fin, sur mon pull aussi saturé d'eau que les mousses dégorgeant sous mes pieds. A peine ai-je compris que j'allais devoir survivre que j'ai déjà l'impression de mourir. Et puis curieusement dans un moment pareil, j'ai sommeil, une fatigue irrésistible. Je redoute un premier symptôme d'hypotermie".

    A noter une courte préface de Grégoire Bouillier où cet extrait a éclairé mes propres impressions "A première vue les bleus sont choquants, les bruns trop fauves ; mais c'est qu'ils sont imaginaires : ils appartiennent à la peinture et à elle seule. Comme les mots, les couleurs glissent au couteau les unes sur les autres, créant de nouvelles textures émotives, des unions au sens érotique du terme. Au sens où la liberté des uns (couleurs, mots) traverse la liberté des autres sans jamais s'y fondre ou s'y diluer, fusionner ou abdiquer."

    L'objet livre est de belle qualité, très agréable à parcourir.

    Merci à l'auteur et aux Editions Gallimard

    Le site de Jérôme Magnier-Moreno

    Jérôme Magnier-Moreno - Highlands -128 pages
    Editions Gallimard (Le sentiment géographique) 2024

  • Bon dimanche

    Je ne pouvais pas passer à côté de cette séquence là, surtout après avoir revu la semaine dernière "Frances Ha" où Greta Gerwig, Présidente du festival de Cannes 2024, danse dans les rues de New-York sur la musique de David Bowie.

    Frances Ha est visible en streaming jusqu'à fin octobre 2024 ici

    En bonus, extrait de Frances Ha

    danse,cinéma

  • Le coeur à rire et à pleurer

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    "Malgré une excessive coquetterie qui me faisait adorer la parure, je n'aimais pas aller à l'église. Il fallait porter un chapeau qui tirait les cheveux, des chaussures vernies qui serraient les orteils, des mi-bas de coton qui tenaient chaud et, surtout, se taire pendant plus d'une heure, ce qui m'était une torture puisque j'avais tout le temps une histoire à raconter."

    J'ai peu lu Maryse Condé et c'était il y a longtemps. J'ai donc eu l'impression de redécouvrir complètement cette autrice récemment disparue avec ce livre de souvenirs.

    Elle y décrit son enfance en Guadeloupe, dans les années 50, dans une famille éduquée, parlant parfaitement le français et fière de sa position sociale.

    La narratrice est la dernière de huit enfants. Le père est vieillissant, fonctionnaire imbu de sa personne, intransigeant. La mère est dure, méprisante envers plus faible qu'elle, pieuse à l'excès.

    La narratrice se révèle assez vite désobéissante, révoltée, trop franche, disant ce qu'elle pense sans filtre. Elle se fait détester à l'école, ne comprend pas ceux qui l'entourent. Elle se réfugie souvent auprès de son grand frère Sandrino, qui lui donne des explications "Papa et maman sont une paire d'aliénés".

    Il faudra du temps avant que la petite fille se rende compte qu'elle est noire dans une société coloniale où c'est une position très inférieure. Un jour à sa grande surprise, elle se fait battre par une fillette blanche, sous le seul prétexte qu'elle est "une négresse".

    Chaque chapitre aborde une histoire différente, dans l'ordre chronologique. L'enfant n'est pas heureuse, trop incomprise, trop rebelle, l'atmosphère familiale est étouffante. Nous suivons son évolution jusqu'à son arrivée en France, adolescente, en hypokhâgne et à la Sorbonne. Elle n'y fera pas grand chose, préférant s'engager en politique en compagnie d'étudiants haïtiens et africains.

    Elle a rejeté sa famille, sa relation à sa mère s'est complètement détériorée. A la fin, une scène bouleversante montre la mère et la fille aussi désespérées l'une que l'autre de cette relation ratée.

    La narratrice tombe amoureuse à Paris et s'engage résolument dans une voie qui sera apparemment pavée d'épreuves.

    L'écriture est fluide, la lecture agréable. Je l'ai trouvée seulement un peu trop courte, j'aurais aimé continuer.

    Lecture commune avec ClaudiaLucia et Miriam

    Maryse Condé - Le coeur à rire et à pleurer - 168 pages
    Pocket - 2001

  • Les doigts coupés

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    "Ça y est, j'ai compris pourquoi vous nous interdisez de chasser... Pourquoi vous nous empêchez même d'apprendre à le faire... Parce que ça vous permet de vous rendre importants en nous expliquant à quel point on est nulles tout en vous présentant comme nos sauveurs... De nous faire croire que c'est pour notre bien que vous nous punissez... Mais la vérité... la vérité, c'est que vous mourez de peur que l'on découvre que vous ne servez absolument à rien !"

    De nos jours, quelque part en Dordogne, des ouvriers polonais creusent une future piscine dans une propriété privée et font une découverte inattendue : deux squelettes apparemment très anciens. La propriétaire les supplie de les recouvrir bien vite de terre, mais les ouvriers sont de bons chrétiens et exigent la bénédiction des corps par un prêtre. S'ensuivra un branle-bas de combat et exit la piscine. Place aux spécialistes qui vont examiner les squelettes. Entrée en scène d'Adrienne Célarier, paléontologue.

    "En tant qu'universitaire elle est arrivée au bout de la course au rat en ayant déjoué tous les pièges. On la traite d'arriviste, mais elle s'en fout car c'est elle qui a le morceau de fromage entre les dents".

    Les corps étaient dans une grotte recouverte de mains peintes, toutes mutilées au niveau des phalanges. Mais pourquoi ?

    A partir de là, le récit se déroule sur deux périodes, la nôtre et celle de l'aurignacien, il y a 35 000 ans. Nous passons des doctes discours d'Adrienne à l'histoire réelle, celle d'Oli, jeune femme de la tribu, rétive aux règles imposées par les hommes, notamment Oncle-Aîné, le chef.

    Le clan est composé d'une quinzaine d'individus, chasseurs-cueilleurs. Les femmes sont cantonnées aux travaux subalternes, qui les maintient dans un périmètre étroit. Les enfants arrivent sans que l'on sache vraiment pourquoi, la relation n'est pas faite entre les accouplements fréquents, consentis ou pas et l'arrivée des bébés ..

    Cette vie ne convient pas à Oli qui veut chasser, faire la même chose que les hommes. Elle y est souvent plus habile qu'eux d'ailleurs, grâce en partie à sa soeur Wilma, très douée pour lui tailler des outils. Oli est gauchère. C'est la seule qui n'a pas d'enfant, elle refuse les accouplements avec ces hommes qui lui répugne.

    Si vous avez lu "la Daronne", vous aurez une idée du ton de ce roman préhistorique, qui ne fait pas dans la dentelle. Il fallait oser se mettre dans la peau d'une jeune aurignacienne, avide de franchir les limites de son clan et se révélant féministe bien avant l'heure, en bouleversant au passage l'ordre du monde.

    Le comique vient du décalage entre les aventures réelles d'Ori et ce qu'en déduit Adrienne, la paléontologue, dans ses conférences devant ses pairs.

    J'ai passé un bon moment à la lecture de ce roman, mais pas autant que j'attendais. Je n'ai pas adhéré au langage bien trop moderne à mon goût d'Oli et sa tribu.

    Ce qui n'empêche qu'il y a de multiples scènes réjouissantes comme celle où Oli règle son compte à celui qui l'a mutilée sans pitié.

    Je précise que l'autrice s'est appuyée sur les travaux très sérieux de l'Italienne Paola Tabet, qui a publié un livre appelé précisément "Les doigts coupés". Elle s'est inspirée également des travaux de Vinciane Despret.

    Merci aux Editions Métailié

    Une interview de l'autrice ici

    L'avis de Cathulu Dasola Je lis je blogue Zazy

    De la même autrice : La daronne - Richesse oblige

    Hannelore Cayre - Les doigts coupés - 192 pages
    Editions Métailié - 2024

  • Bon dimanche

    Mercedes Sosa et Joan Baez
    (Concert de 1988, en Allemagne)

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