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Le goût des livres - Page 5

  • Le tableau du peintre juif

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    "Contrairement aux idées reçues, les Juifs étrangers ont été relativement épargnés par Franco. Celui-ci ne tenait pas à déplaire aux Allemands, mais il cherchait aussi à s’assurer les bonnes grâces des Alliés en prévision de l’après-guerre. Les migrants de confession judaïque étaient confiés au Joint, un organisme financé par la diaspora juive américaine, ce qui arrangeait Franco qui, ainsi, n’avait pas à débourser une peseta pour des gens qu’il ne portait pas dans son cœur, mais qu’il ne pouvait pas ouvertement persécuter."

    De nombreux avis élogieux m'ont incitée à lire ce roman dont la trame principale est de suivre la piste d'un tableau dont Stéphane a hérité d'une tante.

    Stéphane est à un moment de sa vie peu glorieux. Il est au chômage, déprimé après plusieurs échecs, sa femme, Irène, fait bouillir seule la marmite, il a des liens assez distants avec ses deux filles. Il les aime, mais ne sait pas le leur montrer.

    Le cadeau de sa tante vient du grand-père de Stéphane, homme sévère et exigeant dont il a toujours entendu dire qu'il tenait ce tableau d'un peintre juif qu'il aurait caché pendant la guerre.

    Après quelques recherches, il se rend compte que ce peintre est relativement connu, mais qu'il n'a plus rien produit après la guerre. Son grand-père, paysan cévenol taiseux était résistant. Il n'en parlait guère. Désoeuvré, Stéphane se met en tête de faire reconnaître ses grands-parents comme Justes, puisqu'ils ont sauvé un couple juif, au péril de leur vie. Le peintre leur a donné le tableau en remerciement.

    De son côté sa femme fait expertiser le tableau, qui vaut une somme non négligeable. Fatiguée de se démener seule pour assurer les fins de mois, elle demande à Stéphane de vendre le tableau, ce qui leur permettrait de repartir sur de nouvelles bases.

    Stéphane refuse obstinément et suit son idée de rendre hommage à ses grands-parents. Envers et contre tout, il se rend en Israël, où il est reçu à Yad Vashem. Làs ! il apprend là-bas que ce tableau est considéré comme volé. Non seulement ses grands-parents ne seront pas honorés, mais ils passent pour des gens malhonnêtes et profiteurs.

    Stéphane s'entête à continuer son enquête, au grand dam de sa femme. Il se sent investi de la mission de réhabiliter la mémoire de ses grands-parents, soupçonnés d'avoir dénoncé le couple juif et d'avoir provoqué leur déportation. Ses recherches le mèneront des Cévennes à l'Espagne, sur la trace de témoins encore vivants ou d'archives consultables.

    Ma lecture n'a pas été aussi enthousiaste que prévu. Si j'ai beaucoup apprécié les recherches liées au tableau, où j'ai appris pas mal de choses, j'ai été franchement agacée par le personnage de Stéphane, au comportement souvent insupportable. Imbu de lui-même, négligeant complètement son entourage, arrogant, puéril aussi parfois dans ses réactions. S'il y a une bêtise à faire on peut être sûre qu'il ne va pas la rater.

    Heureusement, en contrepoint, nous retrouvions régulièrement la voix du peintre et de sa compagne, lancés dans un périple dangereux, nous révélant petit à petit ce qui s'est réellement passé en 1943. J'ai été bluffée par le dénouement de l'histoire, je ne l'avais pas vu venir.

    Par contre, les retrouvailles de Stéphane avec sa famille m'ont paru trop artificielles et faciles.

    Impression mitigée donc. J'avoue avoir été tentée d'abandonner en cours de route, mais je voulais savoir ce qu'il était advenu du peintre et de sa femme.

    L'avis de Alex Kathel Ingannmic Luocine

    Benoît Séverac - Le tableau du peintre juif -336 pages
    10/18 - 2023

  • Une saison pour les ombres

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    "Il n'avait rien à dire, rien d'intéressant pour elle de près ni de loin, mais la seule présence d'un autre être humain, le son d'une voix, le réconfort d'une discussion sans importance sur la musique, les livres - n'importe quoi - lui était nécessaire. Il était perdu. Ça, il le savait. Caroline n'avait pas été la première à le voir. Un homme construit un château pour se protéger, puis se retrouve piégé à l'intérieur. Où qu'il aille, tous les couloirs le ramènent au même endroit. L'esprit de l'homme n'a pas de carte ; les raisonnements sont si confus qu'on ne sait plus d'où ils viennent. Tout avait commencé à Jasperville. Peut-être que tout se terminerait là-bas également".

    Je cherchais une lecture addictive et j'étais à peu près sûre de la trouver avec ce roman de R.J. Ellory. J'ai été embarquée dans une histoire très sombre se déroulant dans une région inhospitalière du nord-est du Canada, à Jasperville.

    Jack Devereaux est enquêteur dans les assurances à Montréal. Il a fui Jasperville a 18 ans, sans se retourner, abandonnant son petit frère, Calvis, et une amoureuse qu'il s'était engagé à revenir chercher.

    Il n'en a rien fait et est pris au dépourvu lorsqu'il reçoit un coup de fil de la police locale, lui apprenant que son frère a agressé sauvagement un homme, le laissant presque mort, sans raison apparente. Le policier lui demande de venir pour l'aider à comprendre ce qui a pu se passer.

    Dès lors Jack est assailli par un maelstrom d'émotions qu'il peine à maîtriser. Cette fois-ci il ne peut pas se dérober et se résout à partir pour Jasperville, ce lieu maudit où il n'a pas remis les pieds depuis vingt-six ans.

    Jasperville est un coin perdu où l'hiver dure 8 mois, les étés sont humides et envahis par les moustiques. L'unique raison d'être de ce village loin de tout est une mine de fer où le père de Jack espère avoir une chance de gagner honorablement la vie de sa famille.

    Sa femme n'a d'autre choix que de s'incliner et de s'acclimater comme elle peut avec leurs trois enfants, Juliette l'aînée, Jack et Curtis, le présumé meurtrier.

    C'est par flash-back successifs que nous remontons le temps avec Jack, en alternance avec le présent. Nous comprenons assez vite que ce qui l'a fait fuir c'est une atmosphère délétère, de plus en plus dramatique qui pèse sur Jasperville. Ce territoire a d'abord été occupé par les Alquonquins et leurs croyances sont encore vivaces, comme par exemple la présence de wendigos, créatures maléfiques et canibales qu'il vaut mieux ne pas rencontrer.

    Le pire a été la mort de plusieurs jeunes filles, dans des conditions atroces. Leurs blessures ont été attribuées à des bêtes sauvages, ours ou loups, sans chercher plus loin.

    La famille de Jack charriait également son bagage de violence, avec le père, impitoyable avec les enfants, perdant de plus en plus l'esprit.

    Confronté à tout ce passé, Jack devra faire face à ses manquements, ses lâchetés, et reconsidérer les évènements sous un autre jour.

    S'il y a enquête autour de la mort des jeunes filles, ce n'est pas ce qui m'a le plus passionnée. C'est plutôt la description de la vie à Jasperville, les relations familiales, amicales et de solidarité qui se nouent obligatoirement dans une communauté isolée.

    Jack n'apparaît pas à son avantage, il reconnaît ses faiblesses, il essaie de réparer ce qu'il a détruit, il a fui un lieu mais il n'a pas cessé de se fuir lui-même également. Le chemin sera long.

    Une histoire dense, pas avare de rebondissements et de revirements, avec des personnages attachants. Un bon roman noir.

    R.J. Ellory - Une saison pour les ombres - 480 pages
    Traduit de l'anglais par Etienne Gomez
    Le livre de poche - 2024

  • Bon dimanche

    Merci de vos petits mots encourageants et réconfortants. La chute est (presque) derrière moi maintenant. La reprise va se faire en douceur ..

    Youn Sun Nah

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  • Pause

    Après une chute la semaine dernière, j'ai besoin de récupérer et je m'octroie une pause d'une quinzaine de jours, histoire de retrouver mes esprits et mes muscles .. A bientôt en février et en attendant, faites attention à vous.

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    Château du Taillis

  • Incandescences

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    "Sa grand-tante était née sur cette terre-là, y avait vécu huit décennies, et la connaissait aussi bien qu'elle connaissait son mari et ses enfants. Voilà ce qu'elle avait toujours soutenu, et elle était capable de vous annoncer à la semaine près quand la première feuille de cornouiller illuminerait la crête, la première mûre serait assez noire et ronde pour être cueillie. Puis son esprit s'était égaré en un lieu où elle n'avait pu le suivre, emportant avec lui tous les gens de son entourage, leurs noms et les liens qui les unissaient, s'ils vivaient encore ou s'ils étaient morts. Mais son corps s'était attardé, dépouillé d'un être intime, aussi vide qu'une carapace de cigale".

    Je n'avais pas lu l'auteur depuis trop longtemps et j'ai profité du challenge "Bonnes nouvelles" pour renouer avec lui.

    J'ai retrouvé dans ses douze nouvelles tout ce qui m'a plu dans les romans. Le style est puissant, les personnages marquants. Les histoires se déroulent dans les Appalaches, de la guerre de Sécession à nos jours. Il y est  beaucoup question de misère, de conditions de vie dégradées, d'addictions diverses.

    La nouvelle qui m'a le plus touchée est sans conteste "l'envol", l'histoire d'un pauvre gosse, qui découvre par hasard un avion qui s'est crasché et qui s'invente toute une histoire en montant à bord. Son imagination est débordante et lui fait oublier ses parents, tous deux accros aux méthamphétamines. A part la drogue et la manière de s'en procurer, rien ne compte plus vraiment pour eux. La fin de cette nouvelle fend le coeur.

    Il y a aussi "les temps difficiles", autre exemple de pauvreté. Des oeufs disparaissent d'un poulailler. Un vieux couple se dispute autour de ces disparitions, jusqu'au jour où l'homme comprend se qui se passe vraiment.

    Dans une autre nouvelle, une jeune femme enceinte va devoir faire face à un soldat du camp adverse. Elle est seule, elle sait ce qu'il veut et elle va faire face avec sang-froid.

    Ailleurs, ce sont des tombes de soldats confédérés qui sont fouillées. S'ils ont gardé leur ceinture, les boucles se négocient assez cher.

    Les personnages sont souvent confrontés à une certaine solitude, isolés géographiquement, habitués à se débrouiller avec peu de moyens. Pourtant, des gestes d'humanité surgissent, une solidarité de voisinage aussi.

    Ces douze nouvelles nous font toucher du doigt l'éventail des réactions humaines dans des situations d'extrême dénuement, dans un monde rural encore imprégné de vieilles croyances. Tout le talent de l'auteur est de nous faire aimer les personnages, même les moins recommandables parfois.

    Une excellente lecture.

    L'avis de Ingannmic Kathel Sandrion

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    Ron Rash - Incandescences - 208 pages
    Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Isabelle Reinharez
    Seuil - 2015

  • Jardins de rêve

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    "Mes yeux suivaient le parcours de la lumière et je commençai d'apprécier la multiplicité des couleurs, des textures, des étages de végétation et des motifs dans le jardin.
    Je me sentais incroyablement inspirée, incitée à saisir et enregistrer tout ce que je voyais. Mon amour de la lumière paraissait m'aider à appréhender la beauté de ce jardin - et c'est depuis lors l'élément clef qui a guidé mon travail"

    Vous savez à quel point j'aime les jardins, aussi je n'ai pas hésité à demander ce beau livre lors d'une opération Masse Critique.

    70 jardins parmi les plus beaux du monde sur quatre continents (Océanie, Amérique du Nord, Europe, Asie). Claire Takacs les photographie depuis une vingtaine d'années. Deux en France, le jardin Plume, que je connais bien, pas très loin de chez moi et le jardin de Berchigranges.

    La part belle est faite aux photos bien sûr et un texte explicatif accompagne chaque jardin. L'approche est plutôt naturaliste, dans le sillage de certains paysagistes, dont Piet Oudolf, qui a ouvert son jardin privé.

    Je suis loin d'avoir lu entièrement le livre, je le déguste page après page, légèrement envieuse de la photographe sur place à toute heure du jour, pouvant capter les meilleures lumières, les brumes du matin, les couchers du soleil. Le résultat est superbe et donne à rêver et qui sait, à voyager à la rencontre de quelques jardins.

    La photographe développe un réseau de passionnés et des correspondances se font parfois entre les jardins. "L'un des mes moyens pour découvrir des jardins est le jeu des relations que je peux nouer en faisant des photographies ou en visitant d'autres jardins. Lors de mon séjour à Great Dixter, Aaron Bertelsen - qui vit là-bas et travaille au potager - me dit que le jardin Plume était l'un de ses lieux favoris, spécialement en automne. Je suis donc allée en Normandie pour voir ce qu'il en était".

    Paysages, styles, couleurs, saisons, l'éventail est large, l'oeil captivé. Un livre à prendre et à reprendre, je suis sûre que l'on y découvre toujours quelque chose de nouveau.

    Un beau cadeau à faire et à se faire.

    Vous pouvez trouver des photos sur le site de Claire Takacs
    et un extrait du livre sur le site de l'éditeur
    J'ai parlé plusieurs fois du Jardin Plume sur mon ancien blog, ici.

    Merci à Masse Critique et aux Editions Delachaux et Niestlé

    Claire Takacs - Jardins de rêve -304 pages
    Editions Delachaux et Niestlé - 2023

  • On dirait des hommes

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    "Elle se laisse tomber dans son fauteuil, déjà contrainte de retrouver de l'énergie. Dans quelques minutes, un couple va encore se déchirer autour de la garde de ses enfants. Dominique se prend parfois à apprécier ses dossiers pour tapage nocturne, des bagarres dans les bars, des escroqueries aux assurances, ça la change un peu de cette violence domestique qui n'en finit pas de déferler. Les pas résonnent sur le lino, les chuchotements bruissent dans les locaux encore presque déserts. La juge range ses cigarettes au fond de son sac, inspire profondément".

    Le livre s'ouvre sur une scène déchirante. Celle d'un petit garçon de 10 ans, Gabriel, qui se noie. Son père se jette à l'eau, mais n'arrivera pas à le sauver.

    Une enquête est ouverte, qui conclut à une mort accidentelle. La juge d'instruction, Dominique Bontet, devrait fermer le dossier, mais elle n'y arrive pas. Quelque chose la retient, sans qu'elle arrive à cerner quoi exactement.

    Thomas et Anna, installés depuis peu en Bretagne, essaient de survivre comme ils peuvent à ce drame. Ils avaient eu un coup de coeur pour ce village en bord de mer et s'y plaisaient beaucoup. Ils s'épaulent, sans éviter la culpabilité, les regrets, l'épuisement, les nuits sans sommeil, les images traumatisantes revues sans fin par Thomas.

    Parallèlement, une autre histoire nous est racontée, celle d'Iris et de Patrice, couple en apparence ordinaire, où les coups tombent dès la porte refermée. Iris se décide à porter plainte, sans fournir suffisamment d'éléments indiscutables.

    On se doute que les deux histoires vont finir par se croiser ; le lien c'est Dominique, la juge, scrupuleuse à l'excès, prenant son travail très à coeur. Les trois femmes feront front pour que la vérité émerge, chacune à la place qui est la sienne.

    C'est un roman assez plombant, où la personnalité des deux couples est révélée par petites touches. J'ai trouvé l'ensemble un peu appliqué, comme si l'auteur avait voulu coller à la problématique des violences faites aux femmes sans rien oublier.

    Thomas est un homme médiocre, instable dans sa vie professionnelle, jaloux de l'épanouissement de sa femme, qui s'est tout de suite adaptée à son nouveau milieu, grâce à son métier d'infirmière. Après la mort de Gabriel, elle l'a soutenu autant qu'elle a pu, en plus de son propre chagrin. Je ne veux pas trop en révéler sur sa personnalité qu'il faut découvrir peu à peu.

    Patrice, c'est l'homme irréprochable en apparence, faisant illusion pour l'entourage, mais un parfait tyran domestique utilisant la violence et les menaces à l'intérieur du foyer.

    Deux femmes sous emprise, d'une manière différente, qui se croisent au bon moment et trouverons le moyen de se dégager de liens mortifères, par l'entremise de la juge.

    C'est dans les dernières pages que survient une révélation bien amenée.

    Un roman qui ne m'a pas vraiment convaincue.

    Des avis plus enthousiastes que le mien chez Babelio

    Fabrice Tassel - On dirait des hommes - 288 pages
    La Manufacture de Livres - 2023