Le goût des livres - Page 7
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Bon dimanche
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Surtensions

"Après douze ans à la crime du 93, il devenait compliqué pour ces flics de parler d’une rue sans la connaître pour un viol, un enlèvement ou un homicide."
Les polars se suivent et ne se ressemblent pas. Je ne peux pas qualifier celui-là de pépère, loin s'en faut.
J'ai aimé les deux précédents romans (ici et là) mettant en scène le Capitaine Victor Coste et je savais que je le retrouverais tôt ou tard. Voilà qui est fait avec ce troisième opus, aussi fort que les précédents.
Victor Coste n'arrive pas tout de suite, nous avons d'abord une longue introduction sur l'univers des prisons, aussi cauchemardesque que prévu et même au-delà. Nous allons faire la connaissance de plusieurs détenus qui auront leur importance (ou pas) dans ce qui va suivre.
Plusieurs affaires s'entremêlent ensuite, difficile à démêler, entre une soeur prête à tout pour faire sortir son petit frère de prison, une famille retenue en otage et terrorisée et quelques malfrats qui ne font pas dans la demi-mesure.
Pas question de divulgâcher quoique ce soit ; il faut seulement savoir que c'est un des meilleurs de la série, très noir malgré les touches d'humour. L'équipe de Coste va être mise à rude épreuve, chaque membre est bien décrit avec son caractère et sa manière de réagir.
Coste lui-même n'est pas au mieux de sa forme, après quinze ans dans le 93 il se sent usé, il n'y croit plus et songe sérieusement à démissionner. Son humanité ressort d'autant plus devant les cas de conscience qui lui tombent dessus. Toujours aussi mal à l'aise avec les sentiments, il a du mal à maintenir une relation avec Léa, la médecin légiste.
Il n'y aura pas de happy-end, pour personne.
Il ne faut pas oublier que l'auteur a été policier dans la vie et ce qu'il décrit doit être réaliste, ce qui fait frémir au vu de certains endroits où la vie ne vaut vraiment pas cher et ou certains individus n'ont aucune limite.
Malgré le côté très sombre de l'histoire, j'ai été captivée par cette lecture où la tension ne faiblit pas.
L'avis de Philippe
Olivier Norek - Surtensions - 480 pages
Pocket - 2017 -
Bon dimanche
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Hildur

"Elle regarda le poulet qu'elle venait de réchauffer au micro-ondes et pensa à sa situation. Ce moment allait vite passer. Ce n'était pas le première fois qu'elle éprouvait un effondrement pareil. Il fallait juste qu'elle tienne face à la tristesse".
Je n'étais pas allée en Islande depuis trop longtemps, aussi je n'ai pas hésité à mettre la main sur ce polar lorsque je l'ai vu à la bibliothèque.
L'intrigue se passe à Ísafjorður, dans les fjords de l'ouest, le genre de région où il faut être né pour supporter les aléas climatiques, le froid, les tempêtes, les nuits interminables et l'isolement qui va avec.
Hildur, inspectrice de police, se plaît dans sa petite ville, où elle connaît tout le monde. Elle porte un lourd fardeau, la disparition inexpliquée de ses deux petites soeurs, vingt-cinq ans plus tôt. Ce drame a pesé lourd sur sa vie et elle n'a pas abandonné l'idée d'éclaircir un jour le mystère.
Pour le moment, elle attend l'arrivée d'un stagiaire venu de Finlande, Jakob Johanson. Ils vont travailler en équipe sous la direction de Beta, supérieure compétente et compréhensive.
Détail amusant, Jakob tricote pour se détendre les nerfs. Il semblerait que ce soit moins rare en Islande que chez nous. Le temps de l'enquête lui permettra de réaliser un magnifique pull islandais. Jakob traverse lui-même une épreuve pénible, la dissolution de son mariage et le refus de son ex-femme de lui laisser voir son fils.
Dans ce coin perdu plutôt tranquille, une avalanche vient de permettre de trouver le cadavre d'un vieil homme à la réputation sulfureuse, sans aucun doute pédophile. Ce n'est pas l'avalanche qui l'a tué. Dans la foulée, la découverte de deux autres cadavres montre que les trois morts sont liés. Reste à trouver par quoi.
L'un des trois morts est un proche d'Hildur, elle va donc devoir affronter les difficultés de l'enquête et la tempête émotionnelle déclenchée par une perte personnelle. De plus, elle pense être aussi sur la piste de ses petites soeurs.
C'est ce que j'appelle un polar "pépère", pas de surenchère sanglante, on y parle de l'enquête mais aussi des habitudes de vie des habitants, des relations avec la lointaine capitale, des déplacements difficiles et finalement je me suis plus attachée aux enquêteurs qu'à l'intrigue.
C'est le premier tome d'une série, je suis prête à continuer lorsque le deuxième paraîtra.
L'avis d'Antigone Cathulu Eimelle
Satu Rämö - Hildur - 448 pages
Traduit du finnois par Aleksi Moine
Editions du Seuil - 2024 -
Pause
Trop prise en ce moment par des ennuis familiaux, je mets mon blog en pause, juste le temps de retrouver un rythme plus régulier et récupérer de la concentration. Je vous laisse avec une photo prise à Deauville mardi dernier. Hors saison c'est calme, apaisant et enfin le soleil a brillé toute la journée ! A bientôt.
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Bon dimanche
J'ai déjà eu l'occasion de vous parler du collectif Roseaux et de son deuxième album ici
Roseaux III sort le 21 Mars et promet d'être aussi bon.
Roseaux III sur France-Inter

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Bon dimanche
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Les saules

"On rétorque que c'est la coulée, une gamine d'ici, la Basse Motte, que c'est la famille et qu'on se lâche jamais entre culs-terreux, qu'on se serre les coudes, qu'on a des couilles, qu'on va réfléchir ensemble (comme leurs pères face aux boches) et trouver comment en finir avec ce merdier qui submerge bien plus que leurs bottes."
Quelque part en Bretagne, à une époque non située mais qui semble être l'immédiat après-guerre, un village va être complètement bouleversé par l'assassinat d'une jeune fille de 17 ans, Marie.
Marie est la fille unique du pharmacien qui habite la Haute Motte. Ne pas confondre avec la Basse Motte et ses habitants d'une classe inférieure, comme la famille de Marguerite, qui survit difficilement en élevant des porcs.
Marguerite est une petite fille sale et mal peignée, jamais à la bonne place, essayant désespérément de se faire oublier partout où elle est, surtout à l'école où elle est moquée par tout le monde. Un peu simplette peut-être ou seulement différente dans un monde trop dur.
La mort de Marie va secouer tout ce petit monde. Le policier local chargé de l'enquête est appuyé par une inspectrice venue de la ville. Tout le village ou presque va être interrogé. Personne n'a rien vu, ni rien fait, sauf que ... Marguerite, elle, a vu quelque chose, mais à son habitude elle ne dit rien, enfin pas tout de suite.
C'est un premier roman qu'une libraire m'a fortement conseillé et je me suis laissée convaincre. On pourrait le qualifier de polar rural ou de roman noir, mais peu importe. Le côté pesant d'un trou de campagne perdu est bien rendu, les vieilles querelles, les clivages, les ragots et les classes sociales qui s'ignorent.
Et puis Marie c'est malheureux ce qui lui est arrivé, mais enfin, tout le monde sait bien qu'elle n'avait pas froid aux yeux et qu'elle allumait facilement la gent masculine.
J'ai trouvé l'ensemble parfois caricatural, mais peut-être pas tant que ça et pour un premier roman il est plutôt bien construit. J'ai aimé les interrogatoires de police dont nous n'avons jamais les questions, seulement les réponses, ce qui donne une bonne idée de l'état émotionnel de certains, pas tout-à-fait nets.
C'est surtout la petite Marguerite qui est au centre du récit, attachante, inquiète, toujours à suçoter ses manches de pull, à s'échapper avec son seul ami, Victor, un peu bizarre comme elle. Ce n'est pas facile à la maison avec son père, toujours bourru, sa mère, avare et malhabile dans des gestes qu'elle voudrait affectueux, mais qui n'arrive pas vraiment à aller au bout.
La fin arrive un peu rapidement et ne m'a pas étonnée si l'on pense au milieu et à l'époque.
C'est un livre qui ne se lâche pas une fois commencé ; en le refermant j'ai pensé que j'avais déjà lu cette histoire-là par ailleurs, mais il y a un ton et des personnages qui donnent envie de suivre l'autrice à l'avenir.
L'avis d'Agnès (chez Athalie) Philippe Sandrine
Mathilde Beaussault - Les saules - 272 pages
Editions Seuil - 2025 -
Bon dimanche
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La loi des collines
"Le maire s'en alla et Mick fut soulagé d'avoir un moment pour lui. Il s'était trouvé une bonne dizaine de fois dans cette position - attendre des informations médicales sur un blessé - mais jamais pour un membre de sa famille. La peur soudaine de perdre Linda le glaça jusqu'à la moelle. Il repoussa cette sensation et la rangea dans une boîte. C'était hors de son contrôle. Il traiterait le cas de sa soeur comme n'importe quel autre".
Elle est rude la loi des collines, elle charrie de vieilles rancoeurs et pratique facilement la vengeance. Et rien ne s'oublie.
Voici le troisième et dernier volet des enquêtes de Mick Hardin dans ce coin du Kentucky où il a grandi et qu'il a quitté pour devenir soldat dans des pays en guerre, Afghanistan, Irak, Syrie etc ...
A 39 ans il peut prendre sa retraite et c'est ce qu'il fait, avec le projet d'aller vivre au fin fond de la Corse et y mener une vie un peu semblable à celle des collines. Il est revenu au pays dire au revoir à sa soeur Linda, shérif de Rocksalt, avant de s'envoler pour la France.
Linda enquête justement, avec son adjoint Johnny Boy sur la mort d'un mécanicien hors-pair. Mick n'est pas là pour s'en mêler, mais suite à un service rendu dans un conflit anodin, le voilà embarqué malgré lui dans une histoire de combats de coqs clandestins qui vont l'emmener bien plus loin qu'il ne le souhaitait.
On tire sur Linda qui se retrouve grièvement blessée, deux nouveaux cadavres sont trouvés au grand désarroi de Johnny Boy, peu taillé pour remplacer la shérif.
Nous retrouvons les personnages des précédents épisodes, des hommes taiseux, souvent brutaux, armés toujours. Mick ne respectera à peu près aucune règle dans cette histoire, s'appuyant surtout sur son instinct et son solide entraînement de soldat.
Il montre aussi une grande générosité envers plus faible que lui et se sort de situations dangereuses avec une maestria quasi-magique. J'ai trouvé ce dernier épisode un peu trop boursouflé côté intrigue, je me suis perdue parfois dans les personnages et des situations alambiquées, surtout lorsque Mick s'éloigne des collines.
Il ne faut pas se monter trop exigeant sur la crédibilité de l'ensemble mais j'ai eu plaisir à retrouver Mick une dernière fois et suis toujours aussi étonnée de sa grande politesse devant les femmes, même si elles pointent un fusil sur lui. Il a des manières ce gars-là.
"Quand t'auras trouvé le minable qui lui a tiré dessus, l'embarque pas. Tu l'étales et tu rappliques chez nous, t'entends ?
Oui Madame."Les deux précédents : Les gens des collines - Les fils de Shifty
Chris Offutt - La loi des collines - 288 pages
Traduit de l'américain par Anatole Pons-Reumaux
Editions Gallmeister - 2025





