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Le goût des livres - Page 24

  • Les gens des collines

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    "Elle hocha la tête et lui serra  la main. Habituée depuis longtemps aux manières des hommes, elle maintenait un régime d'exercice quotidien pour renforcer sa poigne. Sans surprise, Knox se mit immédiatement à lui pressurer la main pour démontrer sa virilité. Linda riposta en serrant plus fort, sentant la tension des muscles bandés de son avant-bras. Il relâcha sa main comme un chien qui roule sur le dos pour montrer son ventre et elle sut qu'il lui en voudrait toute sa vie."

    Linda vient d'être nommée shérif d'une petite ville du Kentucky. Peinant encore à se faire respecter à ce poste en tant que femme, elle sait qu'il ne faut pas qu'elle traîne à élucider le meurtre d'une jeune femme que tout le monde aimait.

    Pour l'aider, elle fait appel à son frère, tout juste rentré au pays après des mois d'absence. Mick est enquêteur au sein de l'armée depuis des années, il est rompu aux techniques d'interrogatoires. Il a connu l'Irak, l'Afghanistan, la Syrie et dans ce coin de terre où les généalogies familiales sont importantes, sa présence sera acceptée, ou du moins tolérée.

    Il est officieusement l'adjoint de sa soeur, n'en déplaise au jeunot du FBI qui est dépêché sur les lieux pour mettre des bâtons dans les roues de Linda par le potentat local.

    Si Mick est revenu au pays, c'est parce que son mariage avec Peggy bat de l'aile. A force de l'attendre des mois durant et de le voir repartir longtemps, leur union s'est effritée et il se peut même qu'elle soit terminée, ce qui conduit Mick dans un premier temps à se saoûler copieusement dans la cabane de son grand-père.

    Si l'enquête en elle-même n'a rien d'exceptionnel, j'ai beaucoup aimé l'ambiance du roman, avec ces gens taiseux, qui ne sortent de leurs maisons qu'avec une arme, ont l'habitude de faire justice entre eux et cachent farouchement des secrets bien enfouis.

    Mick progresse entre l'enquête et ses problèmes avec Peggy, c'est un personnage attachant, conscient de ses lacunes et de ses forces, contraint de faire un bilan de la vie qu'il a menée jusqu'ici. Sa relation avec sa soeur Linda est tantôt tendue, tantôt pleine de tendresse bourrue.

    La présence de la nature apporte une touche de poésie à la vie rude de ce coin des Appalaches.

    Il semblerait que ce soit le premier volet d'une trilogie avec Mick. Je m'en réjouis.

    Chris Offutt - Les gens des collines - 240 pages
    Traduit de l'américain par Anatole Pons-Remaux
    Gallmeister - 2022

  • Une famille presque normale

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    "Avant tout, j’étais en colère. Cela semble étrange, en tout cas maintenant, après-coup, mais je devais me trouver dans une phase de choc aiguë. J’avais mis l’angoisse et le chagrin en attente pour me concentrer sur ma survie, sur la survie de ma famille. J’allais nous sortir de là."

    Pour ma première participation au challenge "pavé de l'été" de Brize, j'ai choisi une lecture que j'associais aux vacances et aux pages tournées facilement, espérant un suspense qui me tiendrait en haleine un bon moment.

    Au final, je n'ai pas grand chose à en dire, si ce n'est que je me suis copieusement ennuyée. Je n'ai adhéré ni à l'histoire, ni aux personnages.

    Venons-en à l'histoire. Une jeune fille de 19 ans, Stella, est accusée d'avoir tué un trentenaire, brillant homme d'affaires (louches les affaires). Incarcérée, ses parents n'ont pas le droit de la voir, ni de lui parler. Apparemment la loi suédoise le permet.

    Trois narrateurs se succèdent : le père, Stella, la mère. Le déroulement du drame est donc repris trois fois, révélant des aspects différents et de nouveaux faits.

    Le père est plutôt possessif, il a une vision très lisse de sa fille, alors qu'il y a eu de multiples incidents dans l'enfance et l'adolescence de Stella. Pointilleux, se référant constamment à sa foi et à sa religion, il n'hésite cependant pas à mentir pour innocenter son enfant, alors même qu'il a de forts soupçons.

    Lorsque Stella prend le relais et sans trop de surprises, on se rend compte que le père se fourvoie complètement sur ce qu'est sa fille, sur ses fréquentations et ses faits et gestes. Stella apparaît comme une jeune assez déboussolée, prête à toutes les sottises, en compagnie de son amie de toujours, Amina. Elle avait une relation sexuelle avec la victime, tout en se défendant d'y mettre le moindre sentiment.

    La troisième narratrice, la mère, apporte de nouveaux éléments. Elle n'est pas plus claire que son mari. Brillante avocate, elle piétine elle-même la justice sans scrupule, pour cacher ce qu'elle sait et ce qu'elle a fait dans le passé et au présent.

    Le plus gênant est que je n'ai trouvé aucun protagoniste sympathique, les répétitions sont nombreuses, le style plat. En bref, le pavé a fait plouf. Je signale quand même que j'avais lu de nombreux avis positifs, je ne veux décourager personne.

    C'est une lecture commune avec Sandrion, j'ai hâte de voir ce qu'elle en a pensé.

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    Mattias Edvardsson - Une famille presque normale - 624 pages
    Traduit du suédois par Rémy Cassaigne
    Pocket - 2020

  • Bon dimanche

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  • Pause

    Pause du mois de juin. Retour vers les montagnes jusqu'à début juillet.  Si vous me suivez sur FB il y aura quelques photos. Bonnes lectures. A bientôt.

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  • Bon dimanche

    et une version danse proposée par Colo :

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  • Une fenêtre sur l'Hudson

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    "De nouveau, elle eut du mal à concilier la réalité avec le souvenir qu'elle gardait d'Isaac. Depuis un an, chaque fois qu'elle avait un problème avec Benjamin, elle se disait : "Isaac n'aurait pas fait ça" ou "Isaac n'était pas comme ça". En tant que figure du passé, il était extrêmement coopératif. Mais aujourd'hui, alors qu'il se tenait à quelques mètres d'elle, Nora ne se remémorait que trop bien tous ces moments où il avait refusé de se plier à ses désirs, où ils ne s'étaient pas compris."

    Nora, jeune romancière prometteuse est dans un creux de vague. L'inspiration la quitte, elle n'écrit plus que des textes publicitaires ou autre travail utilitaire. Sa vie avec Benjamin ne la satisfait pas et elle pense de plus en plus à Isaac qu'elle a quitté cinq ans auparavant, lui prêtant toutes les qualités.

    Si Nora a perdu l'inspiration, c'est qu'elle s'interdit d'écrire sur ses proches depuis qu'elle s'est fâchée avec plusieurs d'entre eux. C'est une jeune femme sympathique, soucieuse d'autrui, empathique, qui aime sincèrement les autres, mais quand elle prend la plume, elle devient horrible, dévoilant leurs pires défauts et leurs faiblesses. C'est plus fort qu'elle, c'est là qu'elle déploie tout son talent et qu'elle a du succès.

    Un soir de déprime, elle contacte Isaac, désireuse de le revoir et de vérifier s'il est bien tel que dans son souvenir. De son côté Isaac, ne veut pas lui avouer qu'il n'a plus rien du jeune homme idéaliste qu'elle a connu, persuadé qu'il serait l'un des meilleurs photographes de son époque. Après un petit succès d'estime qui a fait pschitt, Il a accepté un travail de bureau, et en fait, il n'a même plus plaisir à photographier. Il se contente de soutenir de plus jeunes que lui, notamment Renée, qui le surpasse.

    Isaac est resté subjugué par Nora qu'il considère comme la femme de sa vie. Nora retombe amoureuse de lui, se condamnant du même coup à ne pas reprendre l'écriture. Isaac ne supporterait probablement pas d'être mis en pièces dans une nouvelle.

    Sur cette trame légère, le roman s'avère plus profond qu'il n'y paraît. Ce qui ne m'étonne pas de l'auteur de "La vie selon Florence Gordon". Les personnages sont attachants, bien décrits, avec humour. La deuxième moitié devient plus grave avec la tante de Nora, Billie, qui a eu une grande importance dans sa vie. Billie est très malade et Nora décide de l'accompagner jusqu'au bout.

    Nora est parfois exaspérante dans ses valses-hésitation entre l'absolue nécessité d'écrire et la certitude de blesser quelqu'un, mais c'est difficile de lui en vouloir, tant elle est capable aussi de générosité, de dévouement et d'amour.

    Nora a-t'elle eu raison de revoir Isaac ? Pourra-t'elle malgré tout se remettre à écrire ? J'ai oublié de préciser que tout ceci se déroule à New-York.

    Une lecture-détente tout-à-fait honorable.

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    Brian Morton - Une fenêtre sur l'Hudson - 313 pages
    Traduit de l'américain par Isabelle Maillet
    10/18 - 2008

  • Résistante

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    "Notre vie dépend du bon vouloir des occupants. Ces nazis que nous surnommons "les doryphores" du nom de ces insectes qui engloutissent les pommes de terre, veulent dévorer la France ! Il m'arrive de me retrouver coincée à la gare de Versailles-Chantiers alors que le couvre-feu vient d'être décrété. Sur le chemin menant à la maison, j'ai repéré des portes cochères que je peux ouvrir facilement afin de me cacher dès que j'entends les soldats frapper le pavé de leurs gros godillots ... En route, je prends parfois un malin plaisir à glisser "mon" journal dans les boîtes aux lettres de collaborateurs, pour défier ces Français particulièrement couards et dangereux".

    Lors d'une émission récente de "la Grande Librairie", j'ai été impressionnée par le parcours et la dignité de Jacqueline Fleury-Marié. J'ai eu envie de poursuivre ce moment avec le livre qu'elle a co-écrit avec Jérôme Cordelier. J'y ai retrouvé une grande part des propos qu'elle a tenus dans l'émission, plus développés bien sûr.

    Jacqueline Fleury-Marié est entrée dans la résistance à 17 ans. Il faut dire que le climat familial l'y prédisposait. Sa mère avait vécu la première guerre mondiale dans la Somme, elle savait de quoi l'occupant était capable et c'était pour elle vital de le combattre à nouveau.

    Toute la famille participait à des degrés de responsabilité divers, les parents, Jacqueline et son frère Pierre. D'abord des petites tâches, puis des missions de plus en plus dangereuses. Jacqueline finira par être arrêtée, sur dénonciation, ainsi que sa mère.

    Elle connaîtra la prison, la torture, jusqu'au jour du départ en wagon à bestiaux, sans savoir si sa mère a subi le même sort qu'elle, ni la destination du voyage. Comme toutes les femmes de son convoi, elle est loin de se douter de ce qui l'attend.

    Ce sera l'arrivée à Ravensbrück en août 1944, sinistre camp de femmes, où elle aura à la fois le bonheur et la tristesse de retrouver sa mère. Elle espérait qu'elle avait pu échapper à cette épreuve. Le récit de Jacqueline rejoint d'autres témoignages sur ce camp, notamment celui de Germaine Tillion. C'est toujours le même choc de les lire.

    Jacqueline Fleury-Marié évoque ses tourments et ses souffrances avec pudeur ; elle rend surtout hommage à ses compagnes, elle insiste sur la solidarité qui existait entre elles et qui lui a permis de survivre. C'était des prisonnières politiques, elles continuaient le combat à leur manière, avec beaucoup de courage, notamment lorsqu'elles ont été contraintes de travailler pour l'armement allemand.

    Elle connaîtra les marches de la mort, jusqu'au moment où, à quelques unes, elles s'écartent de la longue file et se réfugient dans une cabane, sachant les Russes plus très loin. Elles seront repérées par des prisonniers de guerre français, qui les aideront, les protégeant à la fois des nazis et des Russes jusqu'à leur libération.

    Jacqueline espère être rapatriée rapidement en France, mais il faudra attendre encore et le retour ne sera pas facile. Sa mère et elle ne sont pas accueillies à bras ouverts, personne n'imagine ce qu'elles ont vécu, ni n'a envie de le savoir.

    Témoignage précieux d'une dame de 95 ans, qui a continué à oeuvrer pour les survivants des camps après la guerre, en participant à des associations et en se rendant régulièrement dans des classes.

    "Enfin nous allons pouvoir boire. Les visages épuisés et tendus s'ouvrent quelque peu. Boire. Depuis des heures, nous n'aspirons qu'à cela. Six cents femmes guettent le tuyau d'arrosage en espérant l'eau salvatrice. Espérance vaine. Cruauté supplémentaire, cruauté ordinaire. Il faudra bien s'y habituer : aucune d'entre nous ne recevra ne serait-ce qu'une cuillère à café d'eau. Pas la moindre goutte. Même pour la plus malade d'entre nous.

    Jacqueline Fleury-Marié - Jérôme Cordelier - Résistante - 128 pages
    Livre de Poche - 2021

  • Indice des feux

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    "Mais personne en a rien à foutre de ce que je veux. Ça fait un bout de temps que j'ai compris ça. Ma mort m'appartient pas vraiment. Tout le monde veut en faire sa chose. Son jouet, sa bébelle. Avoir son mot à dire, son moment spécial, son souvenir impérissable. Tout le monde en veut un morceau. Mais crisse que je suis écoeuré de partager. Je veux juste qu'on me sacre patience de temps en temps, pis qu'on sorte de ma bulle, pis qu'on me laisse crever en paix.Quand Francine met tout le monde dehors, on dirait qu'on m'enlève un piano à queue en marbre du chest. Mes côtes de décoincent, se décrispent. Mes poumons se déplient. Je respire, ça fait de l'air".

    Voici un recueil québécois de sept nouvelles ayant pour toile de fond les désastres écologiques potentiels en cours et à venir. Pas de panique, ces textes ne sont ni culpabilisateurs, ni moralisateurs, sans pathos gratuit. L'auteur entremêle subtilement évènements personnels et problèmes collectifs.

    La première nouvelle frappe très fort, avec un jeune garçon de 16 ans atteint d'un cancer inguérissable. Les premières pages décrivent un adolescent plein de vie, puis l'inexorable dégradation physique, la dureté des traitements, le rétrécissement total de son monde. Parallèlement la pluie tombe dehors, les inondations sévissent un peu partout, sans que l'on sache où cela va s'arrêter.

    Lorsqu'il en a encore la force, l'ado dissèque l'attitude de son entourage, leur changement de regard sur lui. Isolé sur son lit d'hôpital, il suit la progression de la montée des eaux à la radio, laissant le lecteur secoué devant son impuissance.

    Ma nouvelle préférée, ou devrais-je dire mon personnage préféré est Louis, enfant, puis jeune homme surdoué, promis à un avenir radieux, couvé par sa famille qui en attend beaucoup. Il suit une trajectoire parfaite, jusqu'au moment où il s'éloigne progressivement de la voie qui lui était tracée, pour en suivre une autre, moins brillante socialement, mais plus en phase avec le dérèglement de la planète et les aspirations profondes de Louis.

    L'histoire nous est racontée par le frère de Louis, d'abord en colère après ce qu'il estime être un gâchis, puis comprenant ses motivations et acceptant ses décisions, aussi radicales soient-elles.

    Les autres nouvelles sont tout aussi intéressantes, une ou deux sont un peu plus faibles, mais c'est souvent le cas dans ce genre littéraire, ce n'est pas un problème.

    Ce qu'il faut retenir c'est que pour une première publication, c'est excellent, plein d'émotions, on s'attache avant tout aux personnages, tout en comprenant les enjeux de certains changements et l'apparition de nouvelles préoccupations dans la vie de tout un chacun.

    Seule la première nouvelle utilise pleinement le langage québécois, les autres retrouvent un style plus classique. Un glossaire à la fin permet de comprendre sans difficulté les expressions les plus courantes. 

    "Il a poursuivi avec une suite de conclusions logiques (pour lui) enchaînées rapidement comme si elles relevaient de l'évidence. Un charabia qui sonnait à peu près comme :
    - C'est simple O.K. ? pas de connaissances, pas de reconnaissance. Pas de reconnaissance, pas de lien. Pas de lien, pas d'amour. Pas d'amour, pas de sollicitude. Pas de sollicitude, pas de respect. Pas de respect, mais de sens du devoir moral, pas d'instinct protecteur. Voilà. Simple comme ça. Il faut reprendre du tout début. Partir de la relation".

    "Indice des feux" a reçu le prix du roman écologie 2022.

    Et encore une belle découverte aux Editions La Peuplade.

    L'avis de Ariane Delphine-Olympe Ingannmic Kathel

    Antoine Desjardins - Indice des feux - 360 pages
    La Peuplade - 2021

  • Bon dimanche

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