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  • Le sentier dans la montagne

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    "Tiburius Kneigt, jeune et riche héritier, a eu le malheur de grandir dans une famille d'excentriques. Ses parents décédés, il se trouve à la tête d'une confortable fortune, mais plongé dans une grande solitude : il consacre en effet toute son énergie à se persuader qu'il est gravement malade, et que sa seule occupation doit être de traiter un mal d'autant plus mystérieux qu'il n'existe pas vraiment" (4e de couverture).

    J'ai eu un coup de coeur pour ce très court roman, choisi sur son titre. Tiburius pourrait être un personnage rapidement agaçant, or, il n'en est rien et son lent cheminement vers un retour à une vie pleinement vécue nous est si bien contée que les pages se tournent toute seules.

    Le voir se torturer avec des maux imaginaires et s'abîmer dans une solitude délétère fait craindre plutôt pour sa santé mentale. Il cherche des solutions, sans les trouver et rejette fermement les suggestions de mariage qui peut-être ..

    C'est une cure thermale, énième tentative d'améliorer sa santé qui va faire basculer sa vie de manière inattendue. Pas grâce aux soins, mais par la découverte de la montagne et du plaisir de s'y immerger.

    "Le promeneur suivait le sentier, distrait par tout ce qu'il rencontrait. Ici les boules de corail de la canneberge flamboyaient à côté de lui, ailleurs la myrtille dressait son feuillage luisant et ses baies violacées. Les arbres se resserraient, le sous-bois devenait plus touffu avec, çà et là, l'éclat lumineux d'un tronc de bouleau. Le sentier continuait sans changer d'aspect mais peu à peu, cependant, la sapinière s'assombrit, se resserra, une brise plus fraîche siffla dans les branches et incita Tiburius à rentrer de crainte d'un refroidissement".

    La rencontre avec l'autre, en l'occurrence une jeune fille simple et joyeuse, grande connaisseuse de la montagne et vivant avec son père, va faire accepter à Tiburius ce qu'il fuyait auparavant, le partage, une vie simple au plus près de la nature, le respect de ce qu'elle nous offre et le bonheur d'y avoir accès au quotidien.

    C'est un texte ou l'on prend son temps, d'où il se dégage une impression paisible, malgré la noirceur des pensées de Tiburius, en tout cas en première partie. C'est du moins l'effet qu'il a eu sur moi et je compte continuer avec l'auteur.

    "Notre ami ne manqua pas de retourner au petit chalet niché dans la colline et renouvela ses visites à plusieurs reprises, laissant invariablement sa voiture au même endroit sur la route. Il se plaisait à deviser avec le père de Maria et passait de longs moments en sa compagnie, assis sur le banc devant la porte tandis que la jeune fille s'occupait dans la maison, ou à côté d'eux, abritant ses yeux derrière sa main, observait le ciel ou la montagne tout en se mêlant à la conversation".

    La biographie d'Adalbert Stifter ici

    Adalbert Stifter - Le sentier dans la montagne - 80 pages
    Traduit de l'allemand par Germaine Guillemot-Magitot
    Editions Sillage - 2017

  • Bon dimanche

    A l'invitation de Francis Cabrel, 9 chanteurs de langues régionales (basque, breton, occitan, catalan, créole, corse, alsacien) issus en majorité des Rencontres d'Astaffort, se sont rendus dans le studio du Boiron pour trois jours d'un enregistrement pas comme les autres. La chanson a été écrite à l'occasion du documentaire "Une langue en plus" (France-Télévision).

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  • Le jardin sur la mer

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    "Regardez le jardin, regardez comme il est. Pour en sentir la force et le parfum, c’est la meilleure heure. Regardez les tilleuls … Vous voyez comme les feuilles tremblent et nous écoutent ? Vous riez … Si un jour vous vous promenez la nuit sous les arbres, vous verrez tout ce qu’il vous racontera, ce jardin …" 

    La couverture, le titre, je ne pouvais que me laisser tenter par ce roman d'un grande autrice catalane, inconnue (de moi) jusqu'alors.

    Le coeur de l'histoire est donc le jardin d'une propriété au bord de la mer et le récit de six étés passés là, dans les années vingt, par le jeune couple qui a acheté la maison.

    Ils sont riches, heureux, ne regardent pas à la dépense et le jardinier est content de pouvoir continuer à déployer tous ses dons et ses soins à ce jardin qui lui est si cher. Il y est depuis longtemps et y a vécu avec sa femme, disparue maintenant. Tous ses souvenirs sont là.

    Le couple reçoit beaucoup, s'amuse, se baigne et tôt ou tard vient rendre une petite visite au jardinier, qui écoute patiemment les uns et les autres, l'essentiel étant qu'ils n'abîment pas son jardin.

    L'arrivée d'un nouveau voisin tout aussi riche vient troubler un peu la quiétude du lieu. Les deux propriétaires vont-t'ils entrer dans une forme de compétition à celui qui dépensera le plus ?

    Nous pressentons déjà qu'un drame va avoir lieu, mais quand et lequel ? 

    Avec ce roman, je découvre une très belle plume, ici plutôt contemplative. La vie du jardin est superbement restituée, la beauté du lieu palpable. Un charme certain se dégage de cette histoire.

    Mais voilà, il s'en dégage aussi un certain ennui. Ce n'est pas passionnant la vie de riches oisifs. Peut-être parce que nous n'approchons l'histoire que par le seul prisme du jardinier. Tout est feutré, à peine suggéré, les personnages restent lointains et évanescents. 

    Le style de l'autrice m'a cependant suffisamment plu pour que je tente de futures parutions. Les Editions Zulma annoncent deux autres titres inédits en France. "Le jardin sur la mer" a été édité une première fois en 1967.

    L'avis de Alex Céciloule Géraldine 

    Mercè Rodoreda - Le jardin sur la mer - 256 pages
    Traduit du catalan par Edmond Raillard
    Editions Zulma - 2025

  • La trilogie berlinoise

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    "Mais une nation en tant que telle ne peut ressentir de culpabilité, c'est à chacun de l'éprouver personnellement. Je pris soudain conscience de ma part de culpabilité, sans doute la même que celle de beaucoup de mes compatriotes : je n'avais rien dit, je n'avais pas levé le petit doigt contre les nazis".

    Depuis le temps que je voulais lire cette trilogie de Philip Kerr, voilà c'est fait. Trois romans regroupés en un seul volume de 1024 pages. L'action se déroule successivement en 1936, 1938, 1947, juste avant ou après la guerre.

    J'avais déjà fait la connaissance du personnage principal, Bernie Gunther, avec le septième épisode "Vert de gris" quelques années plus tard, en 1954.

    Bernie a fait partie de la police allemande lorsque l'on pouvait encore en être fier ; ne supportant pas ce qu'elle est en train de devenir avec l'arrivée des nazis, il a démissionné et est devenu détective privé, avant d'être réintégré pour les besoins d'une enquête.

    L'aspect le plus intéressant de cette trilogie est sans conteste le fond historique sur la montée du nazisme, le bouleversement profond qu'il amène et les individus plus ou moins louches qu'il attire. 

    La première enquête "L'été de cristal" a pour décor les jeux olympiques de Berlin ; la deuxième "La pâle figure" confirme un peu plus l'imminence d'une guerre et la transformation de l'Allemagne ; la troisième "Un requiem allemand" se passe en grande partie à Vienne et traite davantage de l'espionnage qui se menait entre les quatre occupants du pays.

    Je reconnais m'être perdue assez vite dans la quantité de personnages gravitant autour de Bernie. Par contre, la réalité du nazisme s'imposant par tous les moyens dans toutes les strates de la société est remarquablement décrite et fait froid dans le dos. C'est terrifiant.

    Le personnage de Bernie est assez complexe et parfois ambigu. S'il veut rester en vie, il doit faire des concessions, mais il n'attire pas la sympathie. Pourtant, il s'efforce de préserver des valeurs, dans un environnement violent et dangereux.

    Par ailleurs son comportement avec les femmes laisse beaucoup à désirer et c'est peu dire. Celles qui croisent sa route ne s'en sortent pas très bien en général. Il n'hésite pas à les utiliser en dépit des risques.

    L'auteur mélange des personnalités connues, Himmler, Goering, Heydrich, à de parfaits inconnus, ce qui donne de la force au récit. Les guerres des chefs, les manoeuvres à qui aura le plus de pouvoir, sont bien décrites.

    Je ne pense pas continuer la série, Bernie m'a laissée finalement assez indifférente, mais cette trilogie est addictive et me paraît importante à découvrir aujourd'hui où les sirènes de l'extrême droite se font entendre, avec des méthodes déjà éprouvées dans le passé et qui ont pourtant bien montré leur nocivité. 

    L'avis de Ingannmic Luocine

    Avec cette trilogie je participe à trois challenges :

    Les épais de l'été de Tadloiduciné chez Dasola

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    Le pavé de l'été chez Sybilline

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    Le pavé d'été chez Moka

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    Philip Kerr - La trilogie berlinoise - 1024 pages
    Traduit de l'anglais par Gilles Berton
    Le livre de poche - 2010

  • La neuvième heure

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    "Je l’aime comme ma fille, dit-elle, sans atténuer la dureté de son ton, comme si l’amour était aussi un devoir désagréable. Le mariage la canalisera peut-être. Pas le couvent. » 

    Après ma lecture de Someone, je n'ai pas tardé à revenir vers Alice McDermott, pressée de retrouver le ton et la chaleur humaine qui m'avait tant plu précédemment.

    J'avais quelque appréhension à cause du contexte où se déroule l'histoire : un couvent, des bonnes soeurs, un drame, une jeune veuve accablée, le spectre de la misère .. j'aurais dû faire plus confiance à l'autrice et à sa capacité d'illuminer n'importe quel sujet.

    Dans les années 1900, toujours à Brooklyn, un homme prépare soigneusement son suicide. Il envoie sa femme à l'extérieur et quitte ce monde en provoquant un incendie. A son retour, Annie découvre le désastre. La voilà seule, enceinte et totalement désemparée.

    Soeur Saint-Sauveur qui passait par là va prendre les choses en main. C'est une bonne soeur au grand coeur, qui s'est forgée sa propre idée de l'église et de Dieu et ne craint pas d'enfreindre quelques règles injustes à ses yeux.

    Elle prend les premières décisions pour ne pas laisser Annie dehors, s'entête à vouloir faire enterrer religieusement le défunt, calmer les voisins victimes de l'incendie. Les soeurs sont connues et respectées par tout le quartier, il n'y a guère de foyer où elles n'apportent pas leur aide.

    Comme dans "Someone" la chronologie n'est pas respectée, ce qui n'a pas d'importance.  Nous suivons une poignée de personnages à des époques différentes, les caractères sont affinés au fur et à mesure, les situations plus complexes qu'il n'y paraît.

    Après quelques jours de flottement, Annie est accueillie au couvent où on l'emploie à la blanchisserie. Elle va accoucher d'une petite fille, Sally, qui va grandir entourée par les soeurs et finir par se convaincre qu'elle aussi est "appelée".

    Annie a le caractère plus trempé qu'on l'imagine au début. Elle va mener sa vie à sa manière, sous le regard bienveillant ou plus sévère, c'est selon, de soeur Lucy, soeur Jeanne, ou soeur Illuminata.

    Les soeurs ne disent rien mais n'en pensent pas moins et font silence sur ce qu'il n'est pas utile d'exprimer. Certaines réflexions laissent supposer qu'elles ne sont pas dupes de ce qui les a fait entrer au couvent, elles n'hésitent pas à critiquer l'église et à soutenir l'inverse de ce qu'elles sont censées appliquer "Dieu, connaît mon cœur, dit-elle. Donc, je n'ai pas besoin de Lui demander son pardon, voyez" !

    Le roman balaie toute une petite communauté irlandaise vivant souvent dans la misère, trop d'enfants, l'alcoolisme, les maladies, le quotidien est dur et les petites soeurs les bienvenues.

    La vocation supposée de Sally sera mise à rude épreuve devant cette réalité brutale. Le sous-sol du couvent ne l'a pas préparée à ce monde-là.

    Je n'en dis pas plus ; ce roman (qui a obtenu le prix Femina 2018) est aussi touchant que le précédent, sans être naïf ou idéaliste, loin s'en faut. Un léger humour y ajoute encore un peu de légèreté. Je compte bien sûr continuer ma découverte de l'autrice.

    L'avis de Dasola Choupynette Dominique Luocine

    Alice McDermott - La neuvième heure - 288 pages
    Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Cécile Arnaud
    Editions Quai Voltaire - 2018