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Rechercher : deux femmes et un jardin

  • Bon dimanche

    Ce n'est pas encore le grand retour, mais c'est un début. Je ne saurais vous dire à quel point je suis heureuse de vous retrouver et je vous remercie mille fois de tous vos mots encourageants. Je prévois un billet le 29 novembre, une lecture commune, juste à point pour participer aux "Feuilles allemandes" chez Eva.

    Après avoir enchaîné les polars faciles cet été, j'ai pu renouer avec des romans plus variés et faire quelques belles découvertes dans la rentrée littéraire. J'essaierai d'en parler au fur et à mesure, même si j'ai un peu oublié les détails. Je préfère rédiger mes billets dès la dernière page tournée, mais il me reste au moins l'impression d'ensemble et pourquoi j'ai aimé.

    Et puisque nous sommes dimanche, je reprends la tradition des vidéos. J'ai entendu cette version du poème d'Aragon à la radio, elle m'a beaucoup plu. Et vous ?

    Ensemble La Palatine

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  • Le testament de Sully

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    "Les êtres humains souffraient d'un tas de problèmes complexes, et la cause du mal n'était pas simple à diagnostiquer. L'approche pragmatique de son père excluait la possibilité, bien réelle, qu'il n'existe pas de remède. Ruth ne l'avait-elle pas reconnu elle-même en s'inquiétant que sa petite-fille soit trop abîmée pour qu'on puisse la réparer ? Si cela était vrai également de Thomas, si la blessure que lui avait infligée Peter et Charlotte dans son enfance était à la fois profonde et permanente, à quoi lui servirait-il de le savoir ? Etait-il possible d'agir après des décennies d'inaction ?".

    Après "Un homme presque parfait" et "A malin malin et demi", voici "le testament de Sully" qui clôt la trilogie.

    Retour à North Bath, bourgade déclinante du New-Jersey. Son insolente voisine, Schuyler Springs, a fini par l'absorber, au grand dam de tout un petit monde de bras cassés ou autres impécunieux de North Bath.

    Sully est mort depuis dix ans, mais son ombre plane toujours sur North Bath qu'il a tant imprégnée de sa présence imprévisible. Sauf pour les pauses dans les cafés de la ville, réglées comme du papier à musique.

    Avant de mourir, Sully a demandé à son fils Peter de prendre soin d'un certain nombre de personnes, son ancienne maîtresse, Ruth, la fille de celle-ci Janey, Rub son ami, complètement déboussolé depuis sa disparition et quelques autres. Peter s'acquitte de sa mission avec sérieux, mais il retape la maison de son père avec l'objectif de quitter les lieux le plus vite possible et de retrouver sa vie d'universitaire hors de ce trou.

    Par ailleurs, le chef de la police, Douglas Raymer, traverse une mauvaise passe. Il vient de perdre son poste suite à la fusion des deux villes et Charice, son ex-adjointe et maîtresse le quitte momentanément pour s'occuper de son frère Jérôme.

    Dans cette situation déjà complexe, vient s'ajouter un cadavre trouvé dans un hôtel abandonné, au milieu du territoire.

    C'est impossible de résumer un roman de Richard Russo. Les personnages sont nombreux, les digressions aussi, les évènements s'enchaînent sur un temps court. Peter réfléchit longuement à la relation qu'il a eue avec son père, les reproches qu'il lui a fait, l'attitude de sa mère. Réflexion qu'il est obligé d'élargir maintenant à un de ses fils, Thomas, qu'il a abandonné également. Répétition désastreuse qui risque de bouleverser durablement sa vie.

    Les personnages des deux premiers romans sont là et je n'ai pas eu de mal à les resituer. Le charme de la lecture est toujours dans le mélange de tendresse et d'humour qui fait passer des situations profondément dramatiques.

    Ce qui domine, c'est toujours un grand plaisir de lecture et l'impression de retrouver de vieux amis. L'auteur n'a pas son pareil pour aborder de grands problèmes en nous faisant rire et pleurer. Les divisions de l'Amérique sont présentes, avec le racisme, la violence, les armes, la domination de certains et l'impossibilité de changer.

    Sully est mort certes, mais il est très présent dans le roman, à travers les souvenirs des uns et des autres.

    Une trilogie foisonnante qui a tenu toutes ses promesses. Et qui sait, peut-être retrouverons-nous un jour Peter et les autres.

    L'avis de Céciloule, Jérôme

    Merci à Masse critique et aux Editions La Table Ronde

    Participation au challenge de Moka "Quatre saisons de pavés"

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    Richard Russo - Le testament de Sully - 544 pages
    Traduit par Jean Esch
    Editions La Table Ronde - 2025

  • Les survivants

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    "Les frères avaient reçu une éducation propre à un milieu social supérieur, mais dans des conditions d’existence inférieures au minimum vital, en quelque sorte. Élevés comme des aristocrates, dressés à toujours se tenir droits comme des i, à faire leur prière avant chaque repas et à serrer la main de papa et de maman avant de quitter la table. Mais il n’y avait pas d’argent, ou plutôt on dépensait très peu d’argent pour les enfants"

    Ce premier roman d'un auteur suédois m'a laissée assez perplexe. Trois frères, Nils, Benjamin et Pierre, reviennent sur les lieux de leur enfance répandre les cendres de leur mère qui vient de mourir.

    La narration est assez complexe, avec des retours en arrière répétitifs, pas toujours faciles à suivre et des redites qui alourdissent  l'histoire. Nous comprenons très vite qu'un drame est survenu pendant l'enfance, mais il faudra attendre la fin du livre pour comprendre lequel.

    Ce jour qui devrait les réunir et les rapprocher les voit s'affronter assez violemment, surtout l'aîné et le dernier. Benjamin cherche comme toujours à calmer les tensions et à comprendre ce qui a pu leur arriver à tous les trois pour qu'ils en soient là.

    Sa mémoire est comme un puzzle dont il essaie de rassembler les morceaux. Il décrit une famille dysfonctionnelle, des parents abusant nettement de l'alcool, les trois frères se débrouillant comme ils peuvent, avec cependant des moments de partage et de joie. Isolés du monde, en bordure de forêt et de lac, ce pourrait être une vie idyllique.

    L'atmosphère est pourtant étouffante, le père pique de violentes colères, la mère est souvent froide et lointaine. Seule sa chienne a son entière affection. L'aîné, Nils, se tient à l'écart de cette "famille de dingues".

    Adultes, les frères ne se côtoient pas beaucoup et parlent encore moins de ce qui a pu les détruire dans le passé. Benjamin ne s'explique pas le silence de ses frères sur certains souvenirs, pourquoi ne lui ont-ils jamais tendu la main ?

    Je n'ai pas vu venir la nature du drame, alors que j'avais été effleurée par un soupçon pendant ma lecture. Si quelques pans du passé s'éclairent, d'autres restent dans l'ombre et je ne suis pas sûre que les relations soient meilleures après entre les frères.

    Une lecture qui laisse une impression de malaise, et qui tourne un peu trop en rond.

    L'avis de Luocine

    Alex Schulman - Les survivants - 304 pages
    Traduit du suédois par Anne Karila
    Albin-Michel - 2022

  • Les ombres filantes

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    "Regarde-les, s'assombrit Janot en levant le menton vers les autres. Regarde-les, ça ne fait pas encore un an qu'on est ici et c'est comme si le monde d'avant n'était plus qu'un vieux souvenir. On dirait presque que ça fait leur affaire. Quand je pense qu'on aurait assez d'essence dans le cabanon pour remplir les réservoirs des véhicules qu'on a cachés sous des branches au débarcadère, je me dis qu'il vaudrait peut-être mieux retourner au village".

    Nous retrouvons ici le narrateur de "le fil des kilomètres" et "le poids de la neige". Nous n'avons pas plus d'éléments sur ce qui se passe dans le pays (le Québec). Une panne d'électricité géante a entraîné une succession de dysfonctionnements, manque d'essence, manque de vivres, errance de la population, constitution de petits groupes plus ou moins dangereux. C'est chacun pour soi pour la survie en attendant une hypothétique issue.

    Le narrateur a passé l'hiver dans une maison sous la neige, les jambes brisées après un accident. Il est remis plus ou moins sur pied et c'est dans la forêt que nous le retrouvons, décidé à rejoindre des membres de sa famille, oncles et tantes. Il sait qu'ils sont réfugiés au camp d'été où il passait ses vacances enfant, loin de tout, vivant de chasse et de pêche.

    Ce troisième opus est aussi bon que le précédent. Après l'hostilité de l'hiver et de la neige, c'est à la forêt profonde que se confronte le voyageur, devant se méfier à la fois de la nature et des hommes. Il chemine seul, jusqu'à ce qu'un curieux gamin de 12 ans se trouve sur son chemin. Seul lui aussi, il aide le narrateur à sortir d'un mauvais pas. Il paraît se débrouiller dans toutes les situations, ne parle pas de lui ou raconte des histoires différentes, mais ne lâche plus l'homme qui finit par accepter sa présence.

    Malgré le contexte post-apocalyptique, la nature a la part belle dans cette histoire. Le narrateur aime sentir la forêt autour de lui, sa végétation, le silence, les présences furtives, avec toujours en tête l'île ou il retrouvera les siens. Mais sera-t'il bien accueilli ? D'autant qu'il arrive avec un enfant, ils représentent deux bouches de plus à nourrir.

    J'ai retrouvé avec plaisir l'ambiance qui m'avait conquise dans "le poids de la neige", un mélange de contemplation et même d'une fusion avec les éléments naturels et par ailleurs le poids des relations humaines. Chaque rencontre a son lot d'inquiétude, génératrice d'entraide ou de violence. Et pour tous ces gens, l'espoir de retrouver un jour une situation normale.

    Dans ce dernier opus, le narrateur fait l'expérience d'une relation quasiment paternelle envers l'enfant, malgré leurs multiples accrochages et coups de colère, réservant une fin puissante et bouleversante.

    Une trilogie à découvrir sans hésitation.

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    Christian Guay-Poliquin - Les ombres filantes - 344 pages
    La Peuplade - 2021

  • Les exportés

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    "Je ne sais pas ce que c'est que d'être juif, on ne m'en a jamais rien transmis et cela ne me manque pas.
    Ayant grandi en France et en démocratie, nul ne m'a jamais "désignée" malgré moi. En revanche, je comprends en lisant Perec que "je suis étrangère à quelque chose de moi-même" différente non pas des autres, mais "différente des miens". En effet, je ne parle pas la langue que ma mère parlait avec ses parents, je ne partage pas "leurs souvenirs, leur histoire, leur culture, leur espoir". Je n'ai pas le sentiment d'avoir oublié, mais celui de n'avoir jamais pu apprendre".

    Jusqu'à présent, comme tout le monde, je connaissais Sonia Devillers en tant que journaliste à France-Inter. J'ignorais qu'elle était d'origine roumaine et juive.

    J'ai donc découvert son histoire familiale avec ce récit sous forme d'enquête prenante. Je n'ai pas de connaissance particulière sur l'histoire roumaine, j'en connais les grandes lignes, sans plus, je n'avais jamais entendu parler de ce troc de l'Etat roumain, juifs contre bétail et ensuite simplement espèces sonnantes et trébuchantes avec Israël.

    Les grands-parents de l'autrice sont issus de milieu bourgeois. Harry et Gabriela n'ont jamais vraiment raconté comment ils avaient traversé la guerre en échappant à la mort. Ils en parlaient comme quelque chose de banal, donnant l'impression de ne pas avoir de ressenti.

    Harry et Gabriela ont adhéré rapidement au discours communiste qui promettait qu'il n'y aurait plus de différences entre les hommes, plus de discriminations. 

    Alors comment se sont-ils retrouvés sur un quai de gare français en 1961, hébétés après un voyage interminable, angoissant et dangereux ?

    L'ouverture des archives de la Sécuritate a permis à l'autrice de remettre en pespective ce qui les avaient amenés là. Au coeur de l'histoire, elle trouve un passeur, juif lui-même, Henry Jacober, dont l'action sera déterminante pour nombre de juifs qui veulent quitter la Roumanie. Le pays ayant un besoin énorme d'argent, va négocier leur départ contre du bétail, porcs, poulets, veaux, mais aussi contre des installations ultra-modernes, abattoirs, bâtiments, clefs en main.

    C'est un récit assez complexe, avec des détails ahurissants. Sonia Devillers se demande régulièrement jusqu'où ses grands-parents ont été au courant de ce qui se passait, surtout lorsqu'ils avaient une place enviable au parti, après la guerre. Ont-ils fermé les yeux pour garder leur position ou croyaient-ils vraiment à un monde nouveau ?

    Le mélange récit familial et grande histoire est bien articulé et se suit facilement. La question de la judéité est centrale, d'autant plus puissante que la famille ne voulait pas en tenir compte elle-même.

    L'autrice a dû se construire dans cette famille ou sa mère et sa tante ont été arrachées à leur pays à 16 et 14 ans et en gardent une blessure certaine.

    Elle fait un portrait assez sévère de sa grand-mère, consciente de sa valeur et n'ayant jamais digéré son déclassement en France, tout en se démenant pour nourrir et éduquer sa famille.

    C'est une lecture que j'ai appréciée, qui amène une pierre de plus malheureusement à ce que l'humain est capable de faire dans le pire. J'ai été un peu parasitée par la perception que j'ai de l'autrice. J'écoute ses émissions et je la trouve régulièrement excessive et de parti-pris, un ton que j'ai parfois retrouvé dans le livre, mais c'est peu de chose au regard de ce qu'elle raconte.

    Sur un thème pas très éloigné, un excellent roman "La musique engloutie" de Christian Haller.

    Sonia Devillers - Les exportés - 288 pages
    Editions Flammarion - 2022

  • Tout le monde n'a pas la chance d'aimer la carpe farcie

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    "Longtemps la cuisine askhénase m'a paru ringarde. Peut-être s'y intéresser est-il le signe qu'on l'est devenu soi-même. Ou qu'on a pris un coup de vieux - cet intérêt terreux pour les racines".

    Quel régal cette lecture et pas seulement parce qu'on y parle de cuisine. Le grand-père de la narratrice meurt, lui laissant un frigo qui sera le prétexte à remonter le temps et à évoquer sa famille et de nombreux moments conviviaux.

    J'aime ce genre de récit où se cotoient l'humour, la légèreté, la tendresse, mais aussi la mélancolie et le drame. Lorsque l'on est issue de branches maternelle et paternelle juives de Pologne, les tragédies ne manquent pas.

    Plus jeune, Elise n'a pas beaucoup questionné ses ascendants sur ce qu'ils avaient vécu. Elle connaît les grandes lignes de leurs pérégrinations pour fuir les nazis, mais sans plus. Le décès du grand-père va l'amener à creuser l'histoire familiale ou du moins les traces qu'il en reste.

    Elle le fait d'abord à travers les plats askhénazes (attention à ne pas confondre avec la cuisine sépharade qui n'a rien à voir). La langue yiddish y tient également une grande place et c'est l'occasion d'anecdotes savoureuses. Elise ne la parle pas, mais connaît un certain nombre de mots qu'elle a entendus toute son enfance.

    "Chava Alberstein, Jacinta, Talila ... le yiddish, pour moi, c'est avant tout la musique et les voix. La chanson yiddish charrie plus de tristesse à mon oreille qu'un mélo mené de main de maître. Ce ne sont pourtant pas les paroles qui font pleurer puisque je ne les comprends pas. C'est la musique elle-même qui pleure. Elle pleure et console en même temps, et c'est ce qui est bouleversant. Elle vous emmitoufle dans son châle de chagrin et vous dit : c'est ainsi".

    L'entourage d'Elise est haut en couleurs, elle nous le décrit de manière fragmentaire, peu importe la chronologie, ce sont des scènes qui remontent, les longues stations devant "Colombo" avec son père, les visites annuelles au cimetière avec nourriture partagée ensuite etc .. j'ai particulièrement aimé l'évocation du quartier du Marais d'autrefois, les commerçants de la rue des Rosiers. J'aimais m'y promener il y a une bonne quarantaine d'années et mes propres souvenirs s'y sont mêlés.

    "Une texture tout à la fois humide et ferme, lourde, celle de la chair du poisson mélangée aux ingrédients de la farce. Il y a fort à parier que la vénération de ma famille pour le gefilte fish avait à voir avec ses modalités de réalisation, la carpe achetée vivante dans un tonneau rue des Rosiers, bastonnée par la balèboustè, la maîtresse de maison, dans la baignoire. Entrait sans doute aussi en compte le temps passé, la dextérité à reconstituer la darne autour de la farce. Le gefilte fish c'est un morceau de bravoure".

    En grandissant, Elise a des conversations plus sérieuses avec son père, portant un autre regard sur lui.

    "Lycéenne, découvrant ce que le pays de Dorothy a fait à Hiroshima, je découvre aussi le point de vue de mon père, contrastant avec le flegme yiddish dont il se départait peu. Allons ! Etais-je donc le perdreau de l'année ? Et tant qu'on y était, ignorais-je que l'Armée rouge s'était arrêtée au bord de la vistule, aux portes de Varsovie, attendant patiemment que les résistants polonais soient écrasés par les nazis ? Etais-je au courant que les Américains l'étaient, eux, au courant, savaient pour Birkenau, Treblinka, et n'avaient pas levé le petit doigt ?"

    Le récit d'Elise Golberg est ponctué de cours extraits émanant d'un groupe Facebook et c'est souvent drôle, décalé, incongru.

    "Essayez donc de faire de la carpe farcie en Bretagne ! Depuis que j'y vis, je n'ai pas trouvé de traiteur yiddish, je fais tout moi-même, j'ai même planté du raifort. Mes gros cornichons viennent de Saint-Malo.
    Mais je n'ai pas encore trouvé de carpe en pays breton ! Imaginez moi le remplacer par un poisson de mer, quelle trahison.
                                 Groupe Facebook des éplucheurs de boulbès"

    Impossible de résumer tout ce qui est abordé dans ce livre, c'est foisonnant, vif et touchant.

    Un premier roman et un coup de coeur pour moi.

    Elise Golberg - Tout le monde n'a pas la chance d'aimer la carpe farcie - 160 pages
    Editions Verdier - 2023

  • Et vous passerez comme des vents fous

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    "Il ferma son épaisse veste polaire - en avril, le froid pouvait vous cueillir, il lui faudrait deux bonnes heures pour s'extirper des bois denses et gagner les hauteurs. Il se sentait faible. Regarde-toi, disait Lucie, tu serais une brebis on dirait que t'es pas en état ! Et elle passait délicatement la main le long de sa colonne saillante. Il s'arrêta un instant pour refaire son lacet, puis regarda alentour, le monde obtus, les crêtes auxquelles il avait accroché ses rêves quelques années plus tôt, leur verticalité suscitait toujours en lui un désir viscéral, mais la possibilité de la chute était désormais ancrée dans son corps, cicatrice aux coutures épaisses".

    Le roman commence fin 19e siècle par la capture d'un ourson, dans les Pyrénées ariégoises. La façon dont Jules l'attrape donne le ton d'une histoire âpre et pleine d'aspérités.

    Les aventures de Jules devenu montreur d'ours reviennent de loin en loin dans le récit, mais ce sont surtout Gaspard et Alma que nous suivrons, de nos jours.

    Gaspard est berger, il repart pour une saison d'estive, loin d'être serein. Un accident l'année précédente l'a durablement traumatisé. Il ne sait pas s'il pourra tenir le coup un nouvel été. Il sait par contre que s'il ne remonte pas maintenant, il n'en sera plus jamais capable et il tient à ce travail, qu'il a dans la peau.

    Alma, elle, est une ethologue chargée d'étudier les comportements et trajectoires des ours arrivés dans la région depuis plusieurs années.La cohabitation avec la population et surtout les éleveurs est difficile. Autant dire qu'elle n'est pas forcément la bienvenue. Ses précédentes expériences dans l'Alaska et aux Asturies ne l'ont pas préparée au peu de moyens qu'elle trouve dans cette nouvelle mission. Sans compter le chagrin amoureux qui la tenaille à propos d'un certain Sam.

    Mais le personnage principal est une ourse imposante, surnommée la Negra, flanquée de ses deux oursons. Cauchemar pour Gaspard, elle fascine Alma jusqu'à l'obsession.

    Je ne pense pas avoir lu jusqu'à présent un roman qui m'ait fait aussi bien sentir ce qu'est la vie en altitude, la faune, la flore, le moindre bruit, les dangers, mais aussi les moments magiques, uniques, qui font que l'on ne peut plus s'en passer, malgré la solitude et la dureté de l'environnement.

    L'autrice s'attache à laisser s'exprimer tous les points de vue à travers ses personnages. Le sujet est complexe d'autant plus que les parties adverses ne sont plus capables de se parler et n'hésitent pas à utiliser une certaine violence.

    L'écriture est superbe, accordée au décor et au contexte. Les chapitres assez brefs alternent entre Gaspard et Alma. J'ai trouvé un peu superflu le périple de Jules au siècle précédent, j'ai trouvé qu'il n'apportait pas grand chose au sujet, sauf à le replacer dans une histoire plus ancienne. J'avais hâte de revenir à l'époque actuelle.

    "A près de deux mille mètres d'altitude, l'humidité lui pénétrait les os. Ils s'étaient placés un peu au-dessus de la couchade, Alma avait indiqué un poste d'observation judicieux. En contrebas, les brebis semblaient composer un corps unique dans leur sommeil. Franck ne disait mot, elle ne l'avait jamais entendu s'exprimer autrement que par des phrases brèves, circonstanciées, comme si la communication devait être réduite à la transmission d'informations, expurgée d'émotion. Eric, lui, pestait toutes les dix minutes de ne pas voir l'ourse, fait chier, pas envie de rester là des jours à faire le siège ..."

    Une histoire forte et nuancée, à découvrir.

    L'avis de Cathulu Eeguab Kathel

    Merci à Masse Critique et aux Editions Actes Sud

    Clara Arnaud - Et vous passerez comme des vents fous -384 pages
    Actes Sud - 2023

  • Pause

    Je ne suis pas en panne de lecture, mais je suis en panne d'écriture. Plus rien ne me vient au moment d'écrire un billet, ma tête est ailleurs. Je fais donc une pause une quinzaine de jours, en espérant retrouver l'inspiration ... Je vous laisse avec une photo de la dernière exposition vue, jeudi dernier.  A bientôt.

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    Claude Monet - Joan Mitchell
    Fondation Louis Vuitton - Paris

  • Bon dimanche

    Dimanche dernier, je vous ai présenté une chanteuse espagnole, Silvia Perez Cruz. J'ai regretté de ne pas comprendre les paroles de sa chanson et Colo a gentiment proposé de les traduire. Un grand merci à elle. Je mets le lien vers son billet ici.

    Cette semaine, changement de registre, ce sera violoncelle et piano.

    Astrig Sinarossian et Jean-François Zygel

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  • Bon dimanche

    Jasser Haj Youssef

    "Jasser Haj Youssef a séjourné plusieurs mois dans le château de Chambord où il a exploré, sans contraintes, le mystère de sa viole d'amour et s'est plongé dans les émotions les plus profondes ... La musique qu'il a composée et enregistrée dans ce château est un véritable pont entre l'Orient et l'Occident, le Nord et le Sud, le passé et le présent, la spiritualité, la nature et les émotions .." (Extrait site du musicien)

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