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  • Bon dimanche

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    Crédit photo : Yann Orhan

  • Bon dimanche

    Astrig Siranossian

    Pour en savoir plus sur cette violoncelliste qui mélange traditionnel arménien et musique classique, vous pouvez écouter une émission de France-Musique ici. Un album vient de sortir "Duo Solo".

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    Crédit photo : Antoine Agoudjian

  • La fille qui voulait voir l'ours

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    "Le coeur battant, le souffle court, je choisis d'avancer. Ce doit être l'un des plus beaux moments du parcours. Le plus incertain, le plus chancelant. Une légère oscillation, un pas de l'autre côté, et c'est un saut dans l'inconnu, dans le grand dehors. Seule au sommet de cette montagne, seule sur terre devant une succession infinie de dômes verts. Je me sens si fragile. Si petite. Une goutte d'eau, un petit caillou, une fougère, un insecte. Une chose minuscule et invisible, impuissante dans le grand tout qui m'entoure."

    Katia Astafieff, marcheuse aguerrie, décide de se lancer dans le sentier des Appalaches, côté canadien, le SIA. Elle veut découvrir la fameuse wilderness, se retrouver seule au coeur de la forêt, et si possible rencontrer l'ours noir qui vit dans ces contrées.

    Ce qui caractérise ce récit de voyage, c'est l'humour de l'autrice. Dès les préparatifs on s'amuse devant ses essais de sac, de chaussures et même de culotte et de soutien-gorge. Elle essaie de ne rien laisser au hasard, dans la partie la plus profonde du sentier elle va être complètement isolée plusieurs jours, sans autres ressources que celles qu'elle portent sur son dos.

    Prévoir les vivres, les points de ravitaillement, les étapes, elle croit avoir une bonne idée de ce qui l'attend. La suite lui prouvera qu'elle n'est pas aussi bien préparée qu'elle le pense.

    Dès le premier jour elle galère, elle avance à deux à l'heure, sous une canicule imprévue. Elle fera 8 kilomètres au lieu des 25 programmés. La suite sera à l'avenant, avec toujours cette lenteur due au terrain qui monte, qui descend, sous une chaleur accablante dès le matin.

    Ce qui rend le périple sympathique c'est le naturel de la narratrice, elle ne cache pas le moins du monde ses failles et ses peurs. Les premières nuits sont affreuses, elle a peur de tout, elle imagine l'ours l'attaquer, un tueur en série lui faire la peau, elle entend des bruits suspects etc ... Ses journées sont un calvaire, elle doit s'arrêter toutes les deux minutes pour poser son sac, bref, elle est loin de son rêve initial.

    Et puis jour après jour, elle avance, sous l'oeil incrédule des quelques personnes qu'elle croise et qui ne peuvent pas croire qu'elle s'est lancée toute seule dans un telle aventure. 500 kilomètres tout de même, en un mois. Elle fera des rencontres plus ou moins agréables.

    On souffre pour elle dans certains passages en se demandant pourquoi elle s'inflige une telle épreuve et de telles frayeurs. Mais peu à peu son état d'esprit change, elle a de grands moments d'émerveillement devant la splendeur des paysages traversés et la beauté de la nature. Elle surmonte même une effrayante chute qui aurait pu lui coûter cher.

    Rencontrera-t'elle l'ours ? Ça je ne vous le dirai pas.

    Une aventure au féminin, dépaysante et sans esbroufe

    "On va au bout de soi-même et on se rend compte que c’est possible".

    Le site de l'autrice

    L'avis de Cathulu

    Katia Astafieff - La fille qui voulait voir l'ours - 256 pages
    Editions Arthaud - 2022

  • La douceur de l'eau

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    "Georges avait-il fait preuve de courage ? ou seulement de naïveté, de cette candeur dont il était coutumier ? Isabelle n'avait pas la réponse, pas plus qu'elle n'avait celle à cette éternelle grande question : comprenait-elle son mari ? Consciemment ou non, en présence des siens, il avait tenu tête à ces hommes sans manifester l'ombre d'une hésitation, d'une voix aussi ferme que lorsqu'il lui expliquait une recette de cuisine, ou lui racontait une de ses blagues favorites. Sans faire preuve exactement de passion, il s'était exprimé avec une ardeur qui n'en était pas loin, et cela aussi la fascinait".

    Nous sommes à Old Ox en Géorgie, à la fin de la guerre de Sécession. Les soldats sudistes vaincus reviennent dans leurs foyers. La troupe Yankee libère peu à peu les esclaves, provoquant la colère des planteurs.

    Ils trouvent cependant une parade en embauchant les affranchis et en les payant si peu que leur vie ne s'améliore vraiment pas, sans compter qu'ils n'ont plus de toit. Prentiss et Landry, deux frères libérés ne l'entendent pas de cette oreille et errent dans la forêt en rêvant à une vie ailleurs.

    Ils croisent Georges, un fermier qui décide de cultiver une parcelle de terre en souvenir de Caleb, son fils, dont il vient d'apprendre la mort au combat. Georges propose aux frères de les embaucher en les payant décemment, leur permettant de mettre de l'argent de côté pour quitter le sud.

    Evidemment, cette situation est très mal vue des habitants de la petite ville, notamment le voisin de Georges, Ted Morton, qui a perdu tous ses esclaves et ne l'accepte pas.

    Les frères se mettent au travail avec Georges, sous l'oeil d'Isabelle, sa femme, désespérée et rendue muette par la mort de son fils. Jusqu'au matin ou Caleb ressurgit ..

    Je ne pense pas nécessaire d'en révéler plus sur l'histoire au risque de trop divulgâcher. L'intérêt de ce premier roman est dans la description d'une époque charnière qui voit un mode de vie disparaître et le futur plein d'incertitudes.

    Nous entrons dans le détail de la vie des anciens esclaves, livrés à eux-mêmes, dans une grande pauvreté, ne sachant pas quoi faire d'une liberté à laquelle rien ne les a préparés.

    La main tendue de Georges va précipiter la famille dans une succession de tensions et de problèmes de plus en plus aïgus. L'auteur a accordé autant d'attention aux remous historiques qu'à la vie de chaque personnage, confronté à ses peurs, ses lâchetés, ses pulsions, destructrices pour certaines.

    La première partie du roman est assez lente, nous faisons connaissance avec les lieux et les habitants, puis les évènements arrivent les uns après les autres et sans que le rythme soit trépidant, une forme de suspense s'installe qui pousse à tourner les pages de plus en plus vite.

    C'est un premier roman captivant, malgré quelques longueurs et une fin un peu trop diluée à mon goût. Les personnages féminins sont forts, Isabelle la femme de Georges, Mildred son amie et Valentine. Le couple de Georges et Isabelle est secoué de toute part, ils se rendront compte qu'ils connaissaient bien mal leur fils.

    L'auteur (rencontré au festival America) est jeune et plus que prometteur. Je ne suis pas loin du coup de coeur.

    L'avis de Keisha

    Nathan Harris - La douceur de l'eau - 454 pages
    Traduit de l'américain par Isabelle Chapman
    Editions Philippe Rey - 2022

  • Sitka

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    "Sitka lèche le plancher autour de la chaise haute, tandis que la rouquine babillante qui y trône laisse joyeusement tomber des miettes pour la chienne-louve. Le gueuleton avalé, la bête lèche aussi les orteils du bébé, puis ses doigts potelés tendus vers elle. Chatouille. La reine rit aux éclats."

    Cette courte nouvelle est une bonne entrée en matière dans l'écriture et l'univers de l'autrice. On y fait la connaissance d'une chienne-louve, Sitka, farouchement attachée à une petite rouquine et à son père, qu'elle appelle le mâle alpha.

    Cette période prendra hélas fin rapidement et Stika passera dans différentes mains moins bienveillantes, loin du foyer d'origine. Elle changera de nom plusieurs fois au gré de ses propriétaires, retournera aussi à une vie totalement sauvage, rendue féroce par la méchanceté des hommes.

    Elle n'a pas oublié la petite reine du début et espère la retrouver un jour, sans se rendre compte qu'elle s'en éloigne toujours plus ; le Canada est grand.

    C'est un texte qui se lit d'un trait, emportée par l'écriture poétique et la beauté de la nature décrite. Le choix de la narration du point de vue de Stika nous rend l'ampleur des difficultés plus palpable.

    "La chienne-louve sait faire la différence entre les forêts saines et les forêts fausses, celles qu'on plante pour les couper encore.
    Elle marche, aujourd'hui, une de ces forêts vides qui suent l'homme piégeur. Linéaires, sans arbrisseaux, privée de couvert et délaissée des êtres ailés. Des rangées d'arbres tous pareils. Ils sentent quand même bon. Ils sentent la vie d'avant. Et se mêlent, petit à petit, aux reines boréales qui n'ont pas peur des vents les plus froids. Elles qui ploient sans grincer ni perdre tête. Entre leurs branches déployées, un chant, un sifflement aïgu."

    De la même autrice : Encabanée Sauvagines
    Le 3e volet de la trilogie "Bivouac" paraîtra en Février 2023

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    Festival América - Septembre 2022

    Gabrielle Filteau-Chiba - Sitka - 64 pages
    Editions XYZ - 2022