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Idiss

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"Parfois, je me suis interrogé sur la foi d'Idiss. Quel sentiment l'animait lorsqu'elle priait ainsi, en ces temps d'épreuves ? Enfant, à l'école de la petite synagogue bessarabienne, elle avait jadis appris les rudiments de la religion juive. Elle avait été élevée dans ses pratiques et avait vécu selon ses rites. Avait-elle cependant conservé une foi inaltérable dans la bonté et la justice divine ? En ces jours du printemps 1940, elle suppliait l'Eternel tout puissant de secourir son peuple et de protéger sa famille. Mais le soleil brillait de l'aube au coucher sur le triomphe de l'armée allemande. Et le silence de l'Eternel était accablant."

On ne présente plus Robert Badinter, l'avocat brillant, ministre de la Justice ayant réussi à faire abolir la peine de mort en France, sous le mandat de François Mitterrand. Je n'avais par contre qu'une vague idée de son histoire personnelle, avant de commencer ce magnifique hommage à sa grand-mère maternelle, Idiss.
 
La famille est originaire de Bessarabie, alors province de l'Empire russe (actuellement en Moldavie) au coeur du Yiddishland. Idiss vit dans un shtetl, dans une grande pauvreté. Elle est analphabète, l'école étant réservée aux garçons. Ce qui lui fera accorder une grande importance à l'éducation de ses petits-enfants par la suite. Elle rencontrera l'amour de sa vie, Schulim, aura deux fils avec lui et plus tard une fille, Chifra, renommée Charlotte en France, la mère de Robert et Claude Badinter.
 
C'est l'antisémitisme et les pogroms qui feront fuir la famille en France. Ils se font une haute idée de la République et de ce qu'elle peut offrir à des exilés comme eux.
 
Le livre est riche d'enseignements sur l'époque et sur l'état d'esprit d'Idiss, qui s'est accoutumée à la vie parisienne et entoure ses petits-enfants de tout l'amour dont elle est capable.
 
Ils propéreront à Paris jusqu'aux jours plus sombres des années trente et de la guerre. C'est tout un monde qui s'écroule alors avec son lot de tragédies.
 
J'ai été touchée par la grande tendresse qui se dégage de ce récit. L'écriture est sobre, l'auteur se fait parfois un peu moqueur devant les défauts ou faiblesses de certains membres de sa famille, sans jamais surcharger.
 
Il évoque leur quotidien, ses souvenirs d'école, il n'était pas question que son frère et lui soient autre chose que premiers de la classe. L'antisémitisme n'était pas si répandu que cela parmi leurs camarades, même avec la montée des fascismes. Le quartier du Marais où se regroupaient la plupart des familles venues de l'Est, ravivait les odeurs, les saveurs qui enchantaient sa grand-mère.
 
A la lecture, on comprend mieux d'où les combats de Robert Badinter prennent leur source. On voit aussi à quel point cette communauté d'exilés était reconnaissante au pays qui les avait accueillis, continuait à avoir le plus grand respect pour lui et à quel point elle est tombée de haut en 1940.
 
Les jours de douleurs ont profondément marqué l'auteur qui n'avait que douze ans au moment de l'arrestation de son père.
 
Au delà de la famille Badinter, ce livre fait revivre un monde qui a complètement disparu avec la guerre. On mesure les profonds bouleversements qui ont jalonné la vie d'Idiss et sa souffrance à la fin de sa vie, confrontée à nouveau à un antisémitisme virulent.
 
Ce récit a été adapté en bande dessinée par Fred Bernard et Richard Malka (Editions Rue de Sèvres)
 
Robert Badinter - Idiss - 264 pages
Le Livre de Poche - 2019
 

Commentaires

  • J'ai lu la bande dessinée de Richard Malka & Fred Bernard que j'ai trouvé assez réussie puisque l'un de ses buts était de rendre le texte de Badinter accessible à un public plus large. Du coup, les passages sur les pogroms et l'antisémitisme sont un peu édulcorés. Si j'ai bien compris, l'écrivain lui-même souhaitait plutôt mettre l'accent sur l'amour familiale, les valeurs positives, etc. C'est un beau portrait de femme.

  • C'est aussi l'histoire de toute une famille, aussi bien côté maternel que paternel ; des trajectoires qui sont assez représentatives de l'époque. Dans le livre, Robert Badinter minore ce que l'on entend d'habitude sur une aggravation de l'antisémitisme au début de la guerre. Il ne l'a pas constaté autour de lui dans la population. C'était évidemment différent au niveau du pouvoir.

  • Je pensais justement à la BD avant d'arriver avant la fin de ton billet. Elle est dans ma PAL depuis un moment, aussi je pense commencer par elle, même si je préfère lire les oeuvres originales avant.

  • Je privilégie toujours le livre qui est forcément plus détaillé, plus complet. J'ai aimé la plume de Robert Badinter.. Je ne vois pas l'intérêt maintenant de lire la BD, je préfère rester sur ma lecture.

  • Bien entendu on connait l'homme médiatique et cultivé et sa femme mais j'ai très peu lu ses écrits. J'avais lu dans le temps "Condorcet" et "Un antisémitisme ordinaire" puis plus récemment "les épines et les roses", il faudrait les relire à présent et pourquoi pas découvrir ses autres écrits. Tu m'en donnes envie en tous les et cet hommage à sa grand-mère pourrait me plaire, mais je ne sais pas quand.... Merci pour ta belle chronique

  • J'avoue ne pas avoir eu envie de lire Robert Badinter avant, mais celui-ci est particulier en ce sens qu'il évoque essentiellement son enfance et sa famille. Je ne m'attendais pas à tant de chaleur dans son récit, j'ai cru lire un roman comme j'en ai tant lu sur les juifs d'Europe de l'Est entre les deux guerres. Il ne cache pas ses émotions, tout en gardant sa réserve habituelle. On perçoit l'homme derrière le politique.

  • Il se lit vite et facilement et en plus la lecture est plaisante. N'hésite pas s'il croise ta route.

  • j'ai commencé ce livre mais j'ai tellement lu sur ce sujet que je l'ai abandonné , je sais que j'ai tort je vais le reprendre un jour.

  • J'ai eu l'impression de retrouver d'autres lectures à travers lui, mais les récits sont à chaque fois différents et intéressants. Il m'arrive aussi de mettre de côté des romans parce que ce n'est pas le moment, rien ne presse, on peut toujours les retrouver.

  • J'ai lu l'adaptation en BD, avec les dessins de Fred Bernard, c'est une évocation pleine de douceur et de couleur. Je ne l'ai pas commentée sur le blog, par contre...

  • Je n'étais pas attirée par la BD, j'ai préféré le livre et je ne le regrette pas ; j'ai beaucoup aimé et il écrit très bien, mais ça nous le savions déjà.

  • j'ai lu ce livre il y a longtemps mais je n'ai pas oublié ce récit très émouvant, R Badinter était vraiment un homme exceptionnel

  • Tout-à-fait remarquable. On cherche désespérément des hommes de sa trempe aujourd'hui. Cette hommage à sa grand-mère est très touchant et permet de mieux saisir l'homme qu'il est devenu.

  • Très intéressante, cette histoire. J'admire Robert Badinter sans l'avoir jamais lu, je note immédiatement ce titre. Merci, Aifelle.

  • Je ne l'avais jamais lu non plus. Je savais bien sûr que son père avait été déporté et n'était pas revenu, mais pas plus. J'ai découvert la trajectoire de sa famille maternelle (et paternelle) depuis le shtetl de Bessarabie à la capitale française. Ils n'ont pas été épargnés par les tragédies du 20e siècle, mais le récit est dominé par la tendresse et l'entraide qui régnaient dans la famille.

  • Avant tout, désolée pour mes désinscriptions/réinscriptions, mais sur mon téléphone, je clique régulièrement sur le mauvais lien à cause de mes gros doigts...
    Le fait que tu dises avoir eu l'impression d'avoir lu un roman me pousse à le noter, au-delà de l'histoire sans aucun doute passionnante et émouvante.

  • Si on ne savait pas qui est Robert Badinter, ce pourrait être en effet un roman comme j'en ai lu bien d'autres sur les habitants du Yiddishland. Mais c'est un grand plus que ce soit lui, on voit mieux sur quoi s'appuyait l'homme qu'il est devenu. Et il écrit aussi bien qu'il parlait.

  • Robert Badinter est quelqu'un que j'admire et qui m'impressionne. Ce livre lui donne une dimension humaine supplémentaire.

  • Tu m'as donné envie de lire ce livre ! Merci à Robert Badinter pour tout ce qu'il a défendu, tout ce qu'il a été et est toujours.

  • N'hésite pas, c'est un récit qui se lit avec plaisir et qui le montre sous un autre jour.

  • Depuis longtemps j'ai prévu de le lire et pas encore fait. je ne sais pas pourqoui. je te remercie de cette piqûre de rappel

  • J'ai cherché un billet chez toi et j'ai été étonnée de ne pas en trouver un. Te connaissant, tu vas le dévorer.

  • Très sincère c'est sûr et assez rare pour être souligné.

  • Je voulais le lire depuis un bon moment et ça aurait été dommage de passer à côté d'un livre de cette qualité là.

  • Il l'est ! n'hésite pas s'il passe à ta portée.

  • Bonjour Aifelle, merci pour ce billet qui me rappelle qu'il faudrait que je lise ce livre à propos duquel Robert Badinter avait beaucoup parlé au moment de sa publication. Bonne journée.

  • Je ne l'ai pas entendu à ce moment-là, mais je dois pouvoir retrouver des interviews. N'hésite pas à le lire, il est vraiment excellent. Bonne journée.

  • J'ai l'impression que les adaptations de livres en BD se multiplient ces derniers temps et c'est une bonne solution pour aborder un thème quand on ne veut pas forcément lire le roman.

  • Je ne peux pas lire un livre sur une grand mère ... Je pleure toutes les larmes de mon coeur ... Mais peut-être en BD ?

  • Tu risques de pleurer souvent en lisant ce livre alors. La BD doit survoler davantage, mais elle est sans doute aussi touchante.

  • Que j’ai aimé ce livre ! Et l’ »Abolition ». J’aime beaucoup sa façon d’écrire toute en finesse alors qu’il parle de sujets lourds et difficiles.

  • L'écriture est remarquable et sur ce sujet très personnel il arrive à avoir la bonne distance, tout en ne cachant pas ses émotions.

  • Je ne savais pas qu'il avait écrit un roman mais c'est un témoignage intéressant ! Et oui, si La France se rend souvent coupable de xénophobie et si tout n'est pas parfait, elle offre malgré tout aux enfants émigrés l'occasion de réussir mais il faut qu'il y ait les parents derrière eux !

  • Dans cette famille les parents étaient bien là, plutôt deux fois qu'une .. Je n'attendais pas ce genre de livre de Robert Badinter, mais il est très réussi, il a su trouvé le ton juste pour parler de sa grand-mère et de sa famille.

  • C'est certainement très intéressant, mais j'ai tellement de mal à lire les documents et récit ... Là, je suis sur le même depuis des semaines, que j'interromps régulièrement au profit d'un roman.
    Comme tu parles de version BD, je vais plutôt me pencher sur celle-ci.

  • C'est un livre qui se lit comme un roman, c'est très loin d'être un essai. Mais tu peux tenter la BD pour te faire une idée.

  • Le livre est forcément plus complet et en ce qui me concerne très agréable à lire.

  • Tu peux aussi tenter la BD, au choix.

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