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Ilaria

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"Je n'ose pas dire "non", je n'ose pas dire que je ne comprends pas , que je m'en fiche complètement des choses plus importantes. Je veux aller à l'école, jouer, voir mes copines, aller aux anniversaires, aux cours de gym. Je veux faire des flic-flac, des roulades,, m'entraîner à la poutre et faire comme Nadia Comaneci. Je veux rentrer. Puis l'idée de quitter Papa me glace. Je ne peux pas le laisser seul."

Ilaria vit en Suisse avec sa mère et sa soeur. Elle a huit ans et ses parents viennent de se séparer. Son père habite en Italie. Elle est étonnée mais contente quand il vient la chercher à la fin de l'école, il s'est entendu avec sa mère, il l'emmène en virée pour le week-end.

Ce qu'Ilaria ne sait pas c'est qu'en réalité il l'enlève. Fulvio n'accepte pas la rupture et veut faire pression sur son ex en la privant de la petite. Elle ne se doute pas non plus que la cavale va durer deux ans.

Au début c'est plutôt amusant, le père est un personnage assez flamboyant, sûr de lui, menteur, il ment tout le temps à tout le monde, avec un aplomb sidérant. Ils passent d'hôtel en hôtel, il fait beau, ça ressemble aux vacances.

En écoutant la radio, nous comprenons que nous sommes en 1980. Si l'équipée est distrayante dans un premier temps, Ilaria se rend peu à peu compte de couacs inquiétants. Et puis sa mère et sa soeur lui manquent.

La force de ce roman est de nous mettre dans la même situation qu'Ilaria ; rien n'est vraiment expliqué, nous sommes dans le même flou qu'elle, même si avec notre regard d'adulte, nous  comprenons parfaitement ce qu'Ilaria ne saisit pas.

Le temps passe, il y a des coups de fil à la mère, qui ne veut pas revenir. De charmant et séducteur, le père passe à des accès de colère, il manipule Ilaria, lui fait croire que sa mère ne veut pas lui parler, qu'elle l'oublie. Ses colères s'aggravent avec la consommation de whisky. Il peut même être cruel.

Malgré tout Ilaria l'aime ce père, elle comprend qu'il est très seul et malheureux, elle se croit obligée de rester avec lui pour le soutenir.

Cette histoire est racontée avec une grande délicatesse ; la situation est révoltante, mais il y a aussi des moments de bonheur, la fuite du père est jalonnée de rencontres, dont certaines chaleureuses. Ilaria peut trouver des appuis et s'attacher à des personnes qui l'entoureront d'affection et de bienveillance.

On sent qu'en Suisse et en Italie, Ilaria et son père continuent à être recherchés. La petite se sent de plus en plus mal dans la vie que son père lui fait mener. Arrivera-t'elle à en sortir ?

Je n'en dirai pas plus, les petites filles ont parfois plus de ressources qu'elles n'en ont l'air.

J'ai refermé ce roman avec une pointe de tristesse pour Ilaria, confrontée si jeune à une situation qui ne pouvait que la dépasser et lui laisser une blessure difficile à cicatriser.

Le sujet est douloureux, mais c'est un coup de coeur, une belle lecture, tant la plume de l'autrice est légère, sans pathos et sans dramatisation.

"Qu'est-ce qui m'empêche de haïr Papa ? La honte que j'ai vue dans son regard, le jour où, exaspérée par ses whiskys, j'ai vidé sa bouteille de Ballantine's dans le lavabo de la salle de bains. J'ai remplacé ce liquide jaunâtre par de l'eau.
Après une longue gorgée bue au goulot, Papa m'a regardé du coin de l’œil. Il a baissé les yeux, sans dire un mot."

L'autrice est plasticienne, d’origines anglaise, italienne et suisse, elle vit à Paris. Formée à la Haute école d’art et de design à Genève, elle puise entre autres son matériau dans sa propre histoire familiale, reprenant photographies, archives, souvenirs et les agençant dans un jeu troublant entre histoire et fiction (Editions Zoé).

Gabriella Zalapì - Ilaria - 176 pages
Editions Zoé - 2024

Commentaires

  • Ce n'est pas facile de parler à hauteur d'enfant et souvent, c'est raté. On dirait qu'ici, la romancière y est très bien parvenue. Un beau livre pour ton retour !

  • J'ai rarement lu un roman où on se sent dans la tête de l'enfant de manière aussi crédible, au cœur de ses interrogations et de ses émotions.

  • Hé bien, tout à fait le genre de livre que j'aime. Zoe a de bons choix, vers des auteurs moins connus (de nous en France)
    A la bibli, réservé par des usagers, mais j'ai noté!

  • J'avais demandé à la bibli de le commander et je l'ai eu la première. Ne le perds pas de vue.

  • J'ai repéré ce titre parmi ceux de la rentrée littéraire .. et j'aime beaucoup ces éditions ZOE.

  • J'ai eu l'occasion d'aller à une librairie à Vevey si je me souviens bien, avec une majorité de livres de chez Zoé . Je ne te dis pas toutes les tentations ... n'hésite pas pour celui-ci.

  • Il fait partie des livres que j'ai notés pour la rentrée. Je l'ai feuilleté et ai trouvé qu'il était plus court que je ne le pensais. Il ne se lit pas trop rapidement ?
    Je vois ton commentaire au-dessus, cette librairie devait être bien tentante ! (et j'adore les bords du Léman)

  • Il peut se lire vite, mais en ce qui me concerne j'ai pris le temps. C'est dur ce qu'elle vit cette enfant et j'ai fait des pauses parce parfois ça m'étouffait.. C'est juste un ressenti personnel ; heureusement il y a aussi des pages lumineuses.

  • Écrire à hauteur d'enfant est un beau défi. Et le sujet s'y prête bien. Sur un thème un peu différent (la séquestration sur plusieurs années), c'est ce qu'a fait Emma Donoghue avec Room. Bon rétablissement Aifelle.

  • Merci Cathie Flore. J'avais beaucoup aimé "Room", mais Ilaria n'est pas du tout le même genre de roman. Difficile de les comparer. "Room" traitait d'une situation exceptionnelle, avec un certain suspense. Ilaria est plus proche des nos vies quotidiennes et des problèmes de pas mal de couples.

  • Le "pitch" me fait songer à la dernière BD de Riad Sattouf (pas encore lue!), "Fadi, le frère volé" (suite de sa série L'Arabe du futur)...
    (s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola

  • Je n'ai pas encore lu "le frère volé" moi non plus, il va falloir être patiente pour l'emprunter à la bibliothèque. Mis à part l'enlèvement d'un enfant, le contexte des deux histoires est très différent.

  • Le sujet est intéressant et sans doute émouvant surtout si l'histoire est racontée du point de vue de l'enfant. C'est une histoire tout à fait d'actualité hélas, avec tous ces couples qui se déchirent et ne veulent pas partager leurs enfants. Je le note mais ça ne sera pas pour tout de suite.

  • La question ici n'est pas tant se partager les enfants que punir la femme qui a osé partir et ne veut pas revenir. L'enfant est le moyen de la faire souffrir indéfiniment .. Heureusement que c'est écrit avec la délicatesse que j'ai évoquée, ça aurait pu être insupportable autrement. Et il y a pas mal de nuances dans cette histoire.

  • tu nous reviens avec un beau livre dont je vais conseiller la lecture moi aussi., (mon billet paraitra plus tard.). En général je n'apprécie pas les romans qui utilisent une voix d'enfant mais ici je l'ai trouvée très juste. J'ai trouvé que ce roman racontait bien ce qu'il se passe pour une enfant qui est dans un enjeu de pouvoir entre deux adultes dont le divorce se passe mal. J'ai beaucoup aimé quand elle est heureuse dans une famille paysanne du sud de l'Italie, loin des conflits des adultes elle redevient une petite fille .

  • Nous sommes d'accord ; je ne suis pas étonnée qu'il t'ait plu. J'ai adoré le passage chez les paysans, là au moins elle a été heureuse et choyée et a pu vivre sa vie de petite fille comme tu le dis. Le majordome de la grand-mère est un beau personnage aussi. J'attends ton billet.

  • Voilà un sujet qui me tente beaucoup, j'en prends note. Merci & bonne soirée.

  • Bonne lecture si tu te décides à le lire. J'appréhendais le sujet, mais il est très bien abordé, sans manichéisme.

  • Toujours poignant le sort d'un enfant pris en "otage" quand le couple se déchire...
    Pas gai le thème mais tu as eu un coup de coeur ...alors je le note!
    C'est bien tu reprends les billets...

  • Je ne pensais pas reprendre de billet aussi vite, mais ça s'est fait naturellement .. et puis avec la météo dehors, je suis plus souvent chez moi. Neige aujourd'hui, froid et vent.

  • C'est un sujet tellement dur que j'aurais spontanément fui ce roman, mais la délicatesse et la justesse dont tu parles me fera sans doute lui donner sa chance. Il est en tous cas déjà dans ma médiathèque !

  • S'il est à la médiathèque n'hésite pas à l'emprunter. Tu verras rapidement s'il te convient .. ou pas.

  • C'est exactement cela, je l'ai repéré dès sa sortie et je n'ai pas été déçue. J'ai souvent fait de belles découvertes chez Zoé.

  • Tu l'as lu ? Je n'ai pas trouvé de billet chez toi. Beaucoup trop de situations sont douloureuses pour Ilaria. Son père la met à une place qui n'est pas la sienne, sans tenir compte de son jeune âge et obsédé comme il est par l'idée de récupérer sa femme à n'importe quel prix.

  • Ravie de te voir te retour, j'espère que tu vas de mieux en mieux. Je note ce titre. merci

  • Merci Manika, je vais mieux et suis ravie de pouvoir reprendre mon blog, enfin. (hélas, je ne peux toujours pas commenter chez toi, mais je te lis).

  • Oui, Zoé est une maison d'édition de qualité. Vous parlez très bien de ce livre : effectivement, raconter l'histoire à partir de ce que ressent l'enfant doit donner une tout autre perspective.
    Bon week end.

  • Le désarroi de la petite fille devant des adultes qui ne lui parlent pas et qu'elle ne comprend pas est poignant. C'est tellement vrai dans tant de circonstances ; elle m'a beaucoup touchée.

  • Le sujet me touche. Obliger un enfant à choisir ? je trouve cela horrible et immoral. je vis voir si je le trouve en bibli !

  • Le roman est court, je n'ai pas voulu trop en dire, il faut le découvrir, mais le personnage du père est horrible. Il est allé loin dans la cruauté et l'indifférence à sa fille. Ce qui l'obsède c'est de récupérer sa femme, Ilaria est juste un moyen. Nous sommes complètement dans la domination masculine.

  • Mais tu es une magnifique tentatrice sur un sujet pourtant difficile à traiter. A hauteur de petite fille, cela doit encore plus faire réfléchir ! Merci ma douce pour ce retour percutant !

  • C'est un sujet pas si abordé que cela en littérature et d'avoir choisi la petite fille comme narratrice fait encore plus réfléchir.

  • J'ai l'impression que ce sujet n'est pas si souvent traité en littérature. Le fait de l'aborder du point de vue de l'enfant est intéressant.

  • C'est ce que je disais plus haut en commentaire. C'était assez risqué comme sujet, surtout en partant de la petite fille, heureusement c'est réussi sinon ça aurait été insupportable.

  • Tu en écris beaucoup de bien mais je ne pense pas que ce soit pour moi, il faut que je me réfugie en ce moment dans des valeurs sûres et qui me laissent dans ma zone de confort. Evidemment je ne connais pas le titre, ni l'autrice, pas plus l'éditeur.

  • Dans ce cas, il n'est pas pour toi en ce moment en effet. Je veille moi aussi à ne pas lire sur n'importe quoi, n'importe quand. Il faut avant tout respecter ses limites, surtout en période de fragilité.

  • Un coup de coeur pour ta reprise, c'est pas mal du tout ^^ Je note mais pas pour tout de suite.

  • Il n'y a pas urgence, mais c'est une belle lecture, qui fait réfléchir.

  • Je vais le lire, ce livre, c'est certain. Il y en a deux qui précèdent, c'est une sorte de trilogie familiale, si je ne m'abuse ?

  • Je sais que son sujet de prédilection est le couple, mais je ne sais pas si on peut parler de trilogie. Je vais me renseigner.

  • J'ai eu la chance de tomber dessus très vite à la bibliothèque.

  • Tu donnes envie de découvrir ce roman qui semble plein de finesse.
    Ravie de te retrouver d'ailleurs !

  • Merci Céciloule. C'est assez fin en effet pour rendre l'histoire supportable et les personnages sont bien vus.

  • Pauvres enfants qui se retrouvent pris en otage par des parents, en souffrance bien-sûr, mais qui pensent d'abord à eux, non ? Je note ce titre parce que tu nous dis que l'auteure parle de ce sujet terrible avec délicatesse. Merci Aifelle, à bientôt. brigitte

  • Le père ne pense pas à la souffrance qu'il inflige à sa fille, c'est certain. Nous connaissons moins l'attitude sa mère, puisque l'enfant en est éloignée et n'a que les échos du père, mensongers et dévastateurs. Une situation malheureusement trop fréquente et très bien rendue ici. Bonne semaine Brigitte, bises.

  • J'ai grand plaisir à reprendre mon blog, même si c'est au ralenti, nos échanges me manquaient beaucoup. A bientôt.

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