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Proust, roman familial

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"A la manière d'un amputé qui, longtemps après l'opération, sent toujours son membre fantôme, le monde familial de mon enfance vivait figé dans la conscience intacte de sa supériorité sociale. Etymologiquement, aristocrate signifie "le pouvoir des meilleurs". Admettre que la noblesse avait perdu son prestige et ne constituait plus l'élite, c'eût été céder à l'inimaginable : l'aveu d'un déclassement. Il ne suffisait donc pas de se tenir, il fallait désormais maintenir coûte que coûte un univers, un décor, un mode d'existence devenus étrangers aux réalités contemporaines et sans rapport avec le siècle".

Je connais Laure Murat de nom, j'ai souvent suivi ses interventions à la radio à propos de ses précédentes parutions, mais à vrai dire je ne m'étais jamais interrogée sur ses origines sociales.

J'ai donc appris à la faveur de "Proust, roman familial" qu'elle était aristocrate et que le monde décrit par Proust était mêlé au sien de plus d'une manière.

"Limité au surgissement de noms familiers dans le cadre d'un roman, le trouble de ma lecture serait resté anecdotique. Mais le plus sidérant, c'était que toutes les scènes lues où l'aristocratie entrait en jeu étaient infiniment plus vivantes que les scènes vécues dont j'avais été le témoin, comme si Proust, à l'image du Dr Frankenstein, élaborait sous mes yeux le mode d'emploi des créatures que nous étions. Il mettait en mots et en paragraphes intelligibles ce qui se mouvait sous mes yeux depuis que j'étais née".

Dans cet essai, Laure Murat mélange histoire personnelle et épisodes de "la recherche" avec finesse et un humour souvent vachard très réjouissant.

Après avoir décrit sa jeunesse, son éducation, campé les membres de sa famille, elle n'hésite pas à affirmer "A ce titre, il ne serait pas exagéré de dire que Proust m'a sauvée".

Je n'ai pas lu "la recherche" (après deux essais ratés) et je l'ai ressenti clairement comme un handicap au fur et à mesure de mon avancée. Je pense être passée à côté du coeur du livre. Lorsqu'elle rapproche certains membres de sa famille des personnages de Proust, longs extraits à l'appui, je me suis sentie plutôt perdue.

Je ne me risquerai donc pas à parler de cet aspect du livre. Il n'en reste pas moins que j'ai eu plaisir à découvrir le parcours de Laure Murat, dont la révélation de l'homosexualité à sa famille a acté une rupture irrémédiable. L'attitude de sa mère notamment fait froid dans le dos.

La description de ce berceau familial me confirme que nous vivons dans le même pays mais sûrement pas dans le même monde. J'ai beaucoup apprécié le style de Laure Murat. Si elle passe dans votre région, n'hésitez pas à aller l'écouter, comme je l'ai fait moi-même à l'automne, au salon du livre de Trouville, c'est un régal.

"Même les relations censément les plus simples sont marquées par l'idée - en partie inconsciente - d'appartenir à une caste modèle, qui exige d'être toujours à la hauteur et de montrer l'exemple. C'est un jeu de rôles permanent. Un aristocrate jouera à l'aristocrate dans la moindre de ses actions, en remerciant un serveur, en saluant une connaissance, en se montrant généreux ou distant. L'aristocrate est, par excellence, quelqu'un qui se prend pour un aristocrate".

C'est une lecture commune avec Miriam et ClaudiaLucia, qui vont avoir bien plus à dire que moi sur "la recherche" puisqu'elles ont organisé un challenge sur une relecture complète.

ma pal

L'avis de Dasola Luocine Dominique Keisha

Laure Murat - Proust, roman familial - 256 pages
Editions Robert Laffont - 2023

Commentaires

  • Comme toi, j'ai commencé (il y a fort longtemps) un roman de Proust et calé dessus... Il est toujours dans mes étagères... Hum hum...
    J'ai noté ce livre de Laure Murat, mais bizarrement, d'autres me paraissent toujours plus urgents !

  • Je garde précieusement mon exemplaire d'"un amour de Swann", on ne sait jamais .. Si Laure Murat n'avait parlé que de Proust j'aurais sans doute abandonné, mais l'aspect vie chez les aristocrates de haute volée vaut le détour.

  • Ce n'est pas un roman, c'est un essai. Ne pas avoir lu Proust m'a gênée, ce n'est peut-être pas le cas pour tout le monde.

  • Ah merci !! Moi aussi j'ai laissé tomber Proust après une tentative avortée avec le début de la Recherche. J'ai tenu plus de 200 pages pourtant... je n'ai aucun intention de recommencer, et passe donc concernant ce titre, qui si je comprends bien, prend tout son sens à condition d'avoir lu Proust.

  • Pour moi il vaut mieux avoir lu Proust, c'est clair. Heureusement que j'avais entendu plusieurs fois Laure Murat parler de son livre, ça me l'a malgré tout rendu vivant et savoureux par moment.

  • Pour ma part, je serai peut-être (ça prend bonne tournure) au rendez-vous de (re)lecture de "Du côté de chez Swann" : je l'audiolis et c'est vraiment je trouve une façon très plaisante de se plonger dans cette recherche qui n'est vraiment pas un roman d'action...

  • Pas vraiment un roman d'action, c'est le moins qu'on puisse dire ! J'ai "un amour de Swann" en CD, mais j'ai eu du mal aussi ; il faudrait que je refasse un essai.

  • Ce titre de Laure Murat est noté et il m'intéresse, bien sûr, pour ces correspondances entre son milieu et celui que décrit Proust, et pour son trajet personnel. "Proust m'a sauvée" m'a rappelé l'essai, réjouissant aussi, d'Alain de Botton : "Comment Proust peut changer votre vie".
    Pour une première entrée dans "La Recherche", pardon si je l'ai déjà écrit ici, plutôt que de commencer par le début, je conseille de lire "Un amour de Swann" (2e partie du premier volume, qui est édité seul en Folio) une entrée plus accessible que le début de "Du côté de chez Swann".

  • Je ne sais plus si c'est chez toi, mais j'ai déjà eu ce conseil de commencer par la deuxième partie. A voir .. Je suis sûre que tu apprécierais beaucoup cet essai de Laure Murat. Elle m'a donné au moins l'envie de lire autre chose d'elle et lorsque je l'ai rencontrée elle m'a encouragée à lire "la recherche", il n'y a pas d'âge pour commencer dit-elle.

  • Tu ne seras pas étonnée que j'ai beaucoup aimé ce livre (merci pour le clin d’œil ) vrai que ne pas voir lu Proust est un peu gênant mais ce peut être l'occasion d'aller y voir d'une façon détendue
    je dirais de la recherche ce que Daniel Pennac disait de la lecture, on est pas obligé de tout lire , on peut sauter des pages, on peut ne pas finir
    ce sont les conseils que j'ai donné à une de mes filles qui comme toi à lu Laure Murat sans avoir vraiment lu Proust

  • En fait, on regarde "la recherche" comme un monument presque inattaquable ; c'est curieux d'ailleurs qu'au fil du temps on l'ait mise sur un piédestal à ce point-là, par rapport au peu d'enthousiasme à sa parution. J'ai au moins découvert un peu plus Laure Murat et c'est un vrai plaisir.

  • Moi aussi j'ai laissé tomber Proust après avoir lu Les jeunes filles en fleurs et de larges extraits du premier livre mais j'étais jeune et c'est pourquoi je m'y lance maintenant en me disant que cette fois-ci j'y arriverai ! On verra ! Un livre très intéressant. Tu as raison de dire que nous vivons dans le même pays mais pas dans le même monde !
    A propos de ce que dit Tania, j'ai cent fois préféré la première partie "Combray" du premier volume à un "amour de Swann".

  • La variété des avis dans les commentaires est vraiment intéressante. Chacun aborde Proust d'une manière personnelle, je ne sais pas si je finirai par y arriver. J'étais un peu navrée pendant ma lecture de voir tout ce que je ratais. Heureusement l'écriture de Laure Murat est un vrai plaisir et la vie dans le coeur de la noblesse vaut le détour. Ça ne fait pas envie.

  • Alors, comme toi j'ai lu le livre de Murat sans avoir vraiment lu Proust. Certains passages sur les liens entre les différentes familles et leurs généalogies m'ont profondément ennuyée (je ne connais pas très bien l'histoire de France non plus).
    Pourtant j'ai aimé ce livre, où, en sautant certains paragraphes, oui, oui, j'ai découvert ce monde si cloisonné, fermé, où ne pas parler de choses qui dérangent fait qu'elles n'existent pas. Un monde étouffant et j'ai compris comment Proust l'avait libérée.
    Merci pour ces extraits aussi, bon...samedi! À demain.

  • Nous avons eu quasiment les mêmes réactions à cette lecture. Laure Murat rend son essai intéressant, surtout sur le milieu où elle a grandi et qui n'est pas accessible au commun des mortels, mais pour ce qui est de "la recherche" difficile de suivre quand on ne l'a pas lue.

  • J'aimerais lire ce livre. Quant à la Recherche, à part des extraits célèbres, je n'ose toujours pas m'y lancer.

  • Je te comprends ! Pour l'essai de Laure Murat, à toi de voir. Je ne regrette pas du tout de l'avoir lu, j'ai beaucoup aimé sa manière d'aborder son milieu d'origine. Mais n'hésite pas à sauter les passages et les extraits sur "la recherche" s'ils t'ennuient.

  • Comme Sandrine, j'envisage une lecture audio. J'en ai entendu des extraits assez fabuleux par André Dussolier et Féodor Atkine. En attendant, je laisse le livre de Laure Murat de côté par crainte de passer à côté.

  • J'ai les premiers CD avec André Dussolier, mais la lecture audio ne me convient pas tellement. Mon attention s'égare assez vite. J'ai quand même l'intention de refaire un essai.

  • Tu penses bien que je me suis régalée du tout!!! Je poursuivrais bien ma relecture (une re re re, d'ailleurs, mais j'en suis au plus, disons, ennuyeux (j'aime le 'pas vraiment d'action de Sandrine') j'attends les autres, quoi.

  • C'est un livre fait pour toi ! tu es sûrement la championne de la relecture sur la blogosphère. Je vais aller regarder de plus près ce que tu as lu de Laure Murat, j'ai envie de continuer avec elle.

  • Je n'ai pas particulièrement envie de lire ce livre, mais j'écouterais son auteure en revanche avec plaisir et intérêt, je crois.

  • Je pense aussi que tu aimerais l'écouter, elle est passionnante sur plus d'un sujet. Je l'ai trouvée très agréable également en dédicace, elle sait se mettre à la portée de son interlocutrice avec naturel. Ce n'est pas si fréquent. L'avantage des petits salons de province, c'est que l'on y est tranquille, elle était très accessible.

  • Quand Dominique avait fait son billet, j'avais noté le titre de ce livre et rajouté sur mon carnet un mot qu'elle avait employé : réjouissant. Une lecture réjouissante, que demander de mieux, cela me tente toujours, c'est le temps pour l'instant qui m'a manqué. Doux week end Aifelle, à bientôt. brigitte

  • Il n'y a pas d'urgence, tu trouveras le temps un jour. Nous sommes toutes un peu dépassées par ce que nous notons. Bon dimanche Brigitte, j'ai l'impression que la météo n'est pas extraordinaire chez toi (chez moi non plus mais c'est plus habituel).

  • j'ai adoré ce livre, je trouve un talent incroyable à cette écrivaine , je lui ai même attribué 10 coquillages 5 pour sa critique de l'aristocratie et 5 pour son analyse de Proust , 10 coquillages sur Luocine c'est du jamais vu !!!

  • J'avais oublié que tu l'avais lu, j'ai rajouté ton billet. J'approuve ton 10, elle les vaut. Puisque tu as lu Proust, tu n'as pas dû en rater une miette et le style de Laure Murat est un vrai bonheur.

  • Bonsoir Aifelle, cet ouvrage est un régal . C'est un livre intelligent. J'espère qu'il donnera envie de (re)lire Proust. http://dasola.canalblog.com/archives/2024/02/14/40203439.html Bonne soirée.

  • Merci pour le lien, je l'ai ajouté ; je te rejoins sur le régal de lecture, même si je n'ai pas pu profiter vraiment de tous les extraits de "la recherche" et de l'évocation des personnages et de leurs inspirateurs.

  • Un livre que j'avais noté certainement à découvrir ....
    J'ai depuis de longues années "un amour de Swann" jamais commencé,un jour il faudrait que je l'ouvre...,tout comme "belle du seigneur",les avis sont tellement partagés pour ces deux ouvrages!!!

  • Le genre de livre dont on se fait toute une montagne .. j'ai quand même fait deux essais avec "un amour de Swann", mais je bloque rapidement. Pourtant, je ne rate pas une émission sur Proust et je m'y intéresse vraiment. Ce n'est pas très grave non plus, il ne faut pas s'en faire une obligation.

  • Étonnamment, je suis allée au bout du premier tome de la Recherche et y ai pris plaisir alors que ce n'était pas gagné d'avance. Par contre, ça ne me tente pas trop de lire Laure Murat autour de ce thème. C'est le côte histoire personnelle qui me dit moins, mais j'avais bien aimé son "Relire".

  • Je note "relire" au passage parce j'ai l'intention de continuer à découvrir Laure Murat. Son histoire personnelle c'est beaucoup la description d'une noblesse complètement anachronique, qui vit hors du temps ; la manière dont elle les décrit est souvent savoureuse, malgré la dureté du milieu.

  • Quitte à passer pour une OVNI, je l'avoue, j'ai lu La recherche, et relu La recherche et je pense que je la relirai encore ... Ce n'est pas un exploit du tout, disons que je suis tombée dedans et comme tout ce qui touche à cet écrivain m'intéresse, je sais que je lirai le titre de Laure Murat.
    Sinon, puisque tu dis avoir malgré tout apprécié ce titre, et que l'auteur t'intéresse, as tu lu les mémoires de Céleste, sa bonne ? C'est savoureux !

  • Mais tu n'es pas toute seule ! Keisha, Dominique et d'autres dans les commentaires ont lu et relu "la recherche". Tu vas apprécier pleinement l'essai de Laure Murat. Je n'ai pas lu "les mémoires de Céleste", mais je me souviens d'émissions sur France-Culture où on l'entendait elle-même et c'était en effet savoureux.

  • J’ai lu « la recherche » mais il ne m’en reste rien..,mais ce que tu dis de ce livre et de Laure Murat est une invitation à découvrir l’auteur.

  • Il ne t'en est vraiment rien resté ? Le livre de Laure Murat pourrait t'intéresser et qui sait, te remettre dans le bain.

  • J'avais noté ce titre il y a quelques mois. Ton billet tombe à point pour
    me le remettre en mémoire. Et oui, je ne peux à mon tour que te conseiller de lire la Recherche. :)

  • C'est amusant la variété de commentaires avec la variété des avis .. tout le monde en a un sur Proust, preuve qu'il a une importance considérable dans la littérature française.

  • Commencer par Combray n'est pas le meilleur moyen d'entrer dans l'Oeuvre, il est vrai. J'espère que ton 3e essai de lecture sera le bon.

  • On verra, mais le troisième essai n'est pas programmé pour le moment.

  • Je n'ai jamais rien lu de Proust, et donc pas non plus "A la recherche".
    Donc si je rencontrais ce livre, il faudrait que je l'aborde uniquement pour le même plaisir que celui que tu as eu.

  • Oui et la partie sur l'enfance de Laure Murat m'a beaucoup intéressée. Tu peux survoler les extraits de Proust .. ou décider de commencer la Recherche.

  • J'avais beaucoup aimé lire le premier volet d'A la recherche, je dois lire le second. Au moins tu as eu du plaisir à lire celui-ci qui reste en périphérie. Peut-être lire seulement Un amour de Swan ? qui est un extrait. Souvent, la rencontre se fait mieux via cette histoire dans l'histoire. ;)

  • Après avoir lu Laure Murat, je ne sais pas trop si je veux vraiment lire "la recherche" ou pas. Je vais laisser faire le temps.

  • ah zut, je pense que pas mal ont adoré. J'ai l'intention de le lire mais peut-être lire/relire La Recherche (j'en ai lu 2-3 tomes) avant, c'est dire que ce n'est pas pour demain...

  • Si tu as déjà lu deux trois tomes de la Recherche, tu auras déjà des points de repère qui te reviendront certainement en lisant Laure Murat. Cette lecture peut aussi te redonner une impulsion pour reprendre la Recherche.

  • C'est surtout compliqué quand on a pas lu Proust. Autrement, la partie sur l'enfance de Laure Murat se lit facilement.

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