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  • Le sanctuaire

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    "Je rejoins la rivière, me débarbouille le visage. Le vacarme de l'eau recouvre mes pensées. C'est exactement ce dont j'ai besoin. Me perdre dans quelque chose de plus grand, un flux sans fin, capable de venir à bout des rocs et des montagnes, une eau qui sache conserver la trace des temps anciens, ère de fougères géantes et de reptiles volants, temps que les glaciers ont gardé intact, preuve que le monde restera monde malgré l'homme et ses cataclysmes, et qu'à l'image des dinosaures nous devrions nous en tenir à cette vérité première : nous ne sommes pas grand chose sur Terre".

    Le sanctuaire, c'est un coin de nature coupé du monde, où s'est réfugiée une famille fuyant une pandémie qui s'est répandue par les oiseaux. Il y a le père, le seul qui s'aventure à l'extérieur pour se ravitailler, la mère et les deux filles, June qui a connu l'autre monde et Gemma qui est née dans le sanctuaire.

    Gemma est une adolescente intrépide, adaptée à cette vie sauvage, adorant chasser avec son père et fournissant son lot de viande à la famille. Le père est dur, décide de tout, corrige rudement, mais sait aussi protéger et bricoler ce qui peut servir à leur subsistance. La mère est plus effacée, douce, nostalgique de leur ancienne vie. Elle en parle souvent et essaie de faire comprendre à Gemma de quoi elle était faite. Une ville, le bord de mer, les sorties, les cafés, les théâtres, les amis .. bien difficile à imaginer pour l'ado.

    A chaque sortie du père hors du sanctuaire, la mère espère qu'il va ramener de bonnes nouvelles, un retour possible .. hélas ce n'est jamais le cas et le père continue à tirer impitoyablement sur tout oiseau qui s'aventure dans leur espace.

    Le statu-quo pourrait durer indéfiniment s'il n'y avait pas la curiosité et la vivacité de Gemma. Mettre le pied à la limite du sanctuaire, aller juste un peu trop loin, suffit à instiller un doute sur ce qu'il y a de l'autre côté. Une rencontre avec un curieux bonhomme et un aigle magnifique va faire basculer la confiance inébranlable accordée au père.

    Je n'en révélerai pas plus sur l'histoire qui reprend un peu la trame du roman précédent "Une immense sensation de calme". 

    Ce qui m'a le plus emportée c'est l'écriture si particulière de l'autrice, splendide, et son talent pour inventer un monde où la frontière entre l'humain et l'animal n'est plus si nette.

    L'histoire n'est pas désincarnée pour autant, la famille se heurte à des fonctionnements bien terre-à-terre. Un père tyrannique, une mère trop passive en dépit des déclarations d'amour à ses filles, deux soeurs oscillant entre leur complicité et des différences qui les séparent.

    Le drame se profile, inéluctable, libérant une violence sous-jacente impossible à arrêter en même temps qu'un espoir peut-être ..

    C'est difficile de rendre justice à un roman aussi original, touchant à plusieurs genres, installant un suspense de plus en plus fort et faisant appel à l'imaginaire sans s'y égarer.

    Vous avez compris que je conseille sans réserve.

    L'avis de Ariane Cathulu Krol

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    Laurine Roux - Le sanctuaire - 147 pages
    Editions du Sonneur - 2020