"Toute ma vie trop grosse, pas assez belle, trop ceci et pas assez cela. des complexes en pagaille et puis, par la magie d'une rencontre une nuit à Paris, j'ai quitté ces obsessions de laideronne pour devenir une femme fatale, m'exiler de ma vieille peau et faire peau neuve. Certains exils sont réjouissants".
Je ne connais pas les livres jeunesse de Susie Morgenstern, pour la bonne raison qu'elle ne les avait pas encore écrits lorsque j'étais moi-même enfant ! Par contre, j'en ai beaucoup entendu parler et quelques interviews à la radio ont attisé ma curiosité, suffisamment pour me lancer dans cette autobiographie originale.
Le livre est divisé en 18 parties, dont les titres donnent une idée
- être une fille
- être loin de ses soeurs
- être juive
- être amoureuse
- errer
- être veuve
- être malade etc ...
L'ordre chronologique est bousculé, ce qui a peu d'importance, l'autrice évoque sa naissance dans une famille juive du New-Jersey, ses soeurs bien plus douées qu'elle (dit-elle) ses années d'école, la fac, puis le départ pour Jérusalem où elle rencontrera Jacques, l'amour de sa vie, un mathématicien français.
La voilà exilée dans un pays inconnu, plein de bizarreries, loin des siens. Les différences entre les Etats-Unis et la France donne lieu à des passages hilarants. Viendront les enfants, les joies et les peines ordinaires, le quotidien à concilier avec l'écriture, les jours sombres de la mort de Jacques et la deuxième rencontre, totalement inattendue.
Susie Morgenstern se livre avec franchise et vivacité, le ton est pétillant. Pourtant, derrière l'auto-dérision on sent parfois la tristesse, les ratés, les manques, effleurés avec délicatesse.
Une lecture plaisante, pleine de vie, mais moins légère qu'il n'y paraît.
"Une journée sans courrier de mes soeurs ou de ma mère était une sorte de petite mort. Ma mère répondait religieusement. Elle m'appelait "son enfant de papier". Mais, malgré le lien indéfectible, mes yeux s'ouvrirent enfin et je compris qu'elle n'avait pas toujours raison. Elle s'agrippait à son pouvoir et j'étais trop bête pour dire non, agir selon mes propres désirs. Pour ma mère, mettre un bébé de sept mois à la crèche était criminel et il fallait être une malade mentale pour faire le marché tous les jours".
L'avis de Cathulu
Susie Morgenstern - Mes 18 exils - 296 pages
L'iconoclaste - 2021